:pirat: Voici la fin de l'histoire les amis!
la fin du Bismarck par Jörg Wischmann (collection personnelle)
Adalbert Schneider responsable de l’artillerie du Bismarck prend d’abord pour cible le vieux Rodney dans l’espoir de le détruire comme le Hood.
Les 380 crachent leurs obus dans un raffut épouvantable.
Les Anglais sont cernés par les salves mais en profitent pour régler leur tir. Un croiseur vient les rejoindre (le Norfolk).
A la 3
èmesalve le Bismarck encadre le Rodney (des éclats touchent le navire et endommagent le dispositif de visée anti-aérienne).
8h59 :
Un autre navire entre en scène (le Dorsetshire).
A bord du cuirassé cerné par 4 navires, il existe peu d’espoir car il est impossible de manœuvrer.
Le soleil monte sur l’horizon éclairant une scène dramatique.
Immédiatement au premier tir Anglais le destin du Bismarck bascule.
Un obus de 406 du Rodney explose près des tourelles Anton et Bruno et les bloque.
(Il est probable que le même tir se répercutant par éclats sur la passerelle ait tué instantanément l’amiral Lutjens , car on n’entendra plus jamais parler de lui).
Le massacre commence.
Un obus de150 mn du Norfolk détruit le poste avant de contrôle de tir, tuant Adalbert Schneider et sa courte vie de croix de chevalier. Coïncidence étrange la même mésaventure est arrivée au Hood.
Ainsi le Bismarck est dès le début privé de la moitié de son artillerie lourde.
—Qu’est-ce qu’il attend ?.
Müllenheim Rechberg attend les ordres de tir de Schneider.
Fredrich Cardinal aux commandes de la salle avant de contrôle de tir répond :
—La communication avec le poste de contrôle principal est coupée. Les tourelles Anton et Bruno sont hors service. Schneider ne répond plus.
Rechberg devient donc responsable des tourelles arrière César et Dora derniers 380 de l’artillerie lourde.
Le Rodney ayant disparu pour se placer en meilleure position de tir. Rechberg concentre le tir sur le King George V s’approchant rapidement.
—Feu !
Rechberg rivé à son appareil de visée a ordonné le tir. Pas facile avec le cap erratique du cuirassé, mais il arrive à peu près à se débrouiller.
César et Dora se déchainent, tirant salve sur salve et encadrent le King George V.
Brusquement une explosion projette Müllenheim Rechberg en arrière et détruit l’appareil de visée.
Désormais le Bismarck est aveugle.
—Tir sans réglage. Ordonne l’officier.
César et Dora tirent désormais au jugé.
9h15 :
C’est la fin.
Le King George V et le Rodney s’approchent sans hésiter pour utiliser aussi l’artillerie moyenne. C’est à ce moment que l’enfer commence.
Une grêle meurtrière s’abat sur le Bismarck.
Le cuirassé est entouré de geysers, ses superstructures envahies d’explosions ininterrompues. Les cuirassés Anglais tirant presque au pointage négatif, les obus rebondissent sur la mer et la coque.
Dans les soutes ont entend le martèlement des explosions et l’ébranlement des tirs de César et Dora. Tout blindage léger est percé comme du gruyère.
Les communications internes sont rompues. Dans la proue régulièrement percée les cadavres s’accumulent.
9h21 :
Un obus de 406 touche César. Les servants s’en sortent mais les canons sont faussés.
9h30 :
Le canon tribord de Dora explose.
9h31 :
Tous les canons du Bismarck se taisent.
Mais les Anglais continuent le tir sans ralentir. (2876 obus furent tirés, dont 719 d’artillerie lourde)
Désormais le cuirassé n’est plus qu’une épave en feu. A chaque coup au but, les plaques de blindage des ponts se soulèvent pour retomber dans un tourbillon d’étincelles.Mais le Bismarck ne s’enfonce pas. Son blindage principal et ses cloisons maitresses résistent.
De son poste de commandement en dessous du kiosque d’observation le capitaine Oels réalise que le cuirassé ne coulera pas. Non seulement les Anglais vont continuer à tirer tant qu’il flottera, mais ils risquent même de remorquer l’épave. Cette dernière perspective insupportable pour l’Allemagne lui fait ordonner :
—Exécutez la manœuvre numéro 5. Sabordez le navire.
C’est lui qui assure désormais le commandement du Bismarck.
Oels et son état major gagnent l’arrière du cuirassé car la proue est ravagée par le feu.
Gerhard Junack est à son poste dans la salle des machines lorsqu’il reçoit l’ordre suivant :
—Sabordez le navire. Dit Walther Lehmann.
Junack acquiesce l’air grave. Il va inspecter les cloisons de la salle des machines afin de s’assurer qu’elles sont ouvertes. Puis il ordonne aux quartiers-maîtres :
—Allumez les mèches des charges de sabordement !.
Ces charges sont placées sur le circuit de refroidissement afin de noyer les chaudières et les machines. Les soutiers exécutent l’ordre, puis tout le monde quitte son poste.
L’ordre de sabordage a été aussi reçu à la poupe par le premier maître Wilhelm Schmidt responsable de l’équipe des avaries. 4 ou 5 obus ont ravagé la poupe dont le système d’éclairage et de ventilation sont détruits.
Il entend :
—Exécution de la manœuvre n°5 !.
Aussitôt il inverse les pompes pour inonder les lieux et demande à ses hommes de le suivre vers les ponts supérieurs. Ils y parviennent à travers les trous d’obus car tout le reste est effondré ou bouleversé.
Heinz Jucknat, Adolf Eich et Franz Halke rampent à travers le navire en ruine au milieu d’amas de ferrailles brulantes et tuyauteries crevées. Ils réussissent à gagner le pont en forçant une écoutille. Aussitôt un liquide brunâtre et visqueux leur coule dessus.
—Mon Dieu Heinz, mais c’est du sang !.
Dans le poste intérieur de commandement le marin Josef Stratz voit les clignotants du panneau de contrôle indiquer que le navire se remplit d’eau rapidement. Il quitte le poste pour rejoindre les ponts supérieurs mais c’est impossible tout est effondré ou obstrué.
—Viens par ici.
Deux marins l’interpellent. Ils s’engagent tous 3 dans un conduit blindé de ventilation aboutissant à l’air libre. Après une horrible reptation dans la graisse, ils sortent enfin épuisés. Un obus volatilise aussitôt les 2 marins et blesse Stratz.
Les survivants sortent hébétés des fonds du navire. Un spectacle dantesque s’offre à eux. Il ne reste aucune trace des canons anti-aériens et projecteurs du poste arrière. La cheminée est percée comme une écumoire. Partout des morceaux humains et du sang jonchent les ponts.
Le capitaine Oels monte sur le pont à ce moment à la tête d’une centaine d’hommes qu’il a réussit à extraire des fonds et emmener avec lui. Ils sont tous tués de plein fouet par le dernier tir Anglais. Voyant cela un canonnier devient fou et se met à tirer sur des avions imaginaires.
10h15 :
Les Anglais cessent le feu.
Le Bismarck commence à giter fortement sur bâbord.
Heinz Jucknat lui, demeure insensible au sang ruisselant sur le pont et les incendies. Hébété dans un état second les oreilles bourdonnantes, il s’assied par terre pour fumer une cigarette.
—Je peux en avoir une ?
Jucknat se retourne et voit un marin ramper vers lui. Comme dans un cauchemar il s’aperçoit qu’il lui manque les 2 jambes. Pourtant l’homme ne saigne pas tant ses moignons sont brulés. Jucknat lui allume sa cigarette.
Tandis qu’ils fument côte à côte un autre matelot s’approche.
— Jette-moi par-dessus bord. Demande le mutilé.
L’autre le regarde interloqué :
—Je ne peux pas faire ça !.
—Je t’en supplie, je suis foutu !.
L’homme hésite quelques instants, puis soulève l’infirme.
Jucknat détourne son regard.
Le Bismarck s’incline de plus en plus, mais les Anglais semblent ne pas s’en rendre compte.Un croiseur s’approche (le Dorsetshire) et tire 3 torpilles. A part des morts supplémentaires, le cuirassé ne semble pas affecté par cette nouvelle attaque.Il coule au rythme du sabordage.
De plus en plus de marins se jettent à la mer, d’autres hésitent, certains chantent de vieux refrains.
10h20 :
Cette fois le cuirassé adopte un angle inquiétant. Il devient difficile de tenir debout.Juknat décide lui aussi de se jeter à l’eau. Il enlève ses bottes, son uniforme et enfile son gilet de sauvetage. Puis trouvant un endroit favorable se laisse glisser dans la mer.
Adolf Eich,Gerhard Junack, Franz Halke suivent le même chemin. Quelques fous sautent la tête la première et se brisent la nuque. Cardinal et Stratz se sauvent par l’avant du navire.
Müllenheim Rechberg pense un instant récupérer ses affaires personnelles. Voyant les regards de ses hommes tournés vers lui, il se rappelle son devoir et demeure avec eux. Il organise leur sauvetage et les regroupe autour de Dora :
—Attendez avant de sauter à la mer, ça vous fera moins de temps dans l’eau glacée. Les Anglais ne sont pas loin. Ils vont nous recueillir.
Le Bismarck s’enfonce lentement par bâbord et par la poupe.
—Saluez le drapeau !. Ordonne Rechberg.
Tout le monde salue et se jette à la mer.
Heinz Juknat qui surnage est stupéfait d’apercevoir Lindemann et un jeune marin sur le gaillard avant. Lindemann semble lui ordonner de sauter à l’eau.
Ce dernier refuse et reste avec lui. Les deux hommes saluent tels des héros Wagnériens
Quelques minutes plus tard le Bismarck coule par l’arrière. Sa proue profilée pointe majestueusement vers le ciel et disparaît.
Il est10h36.
Du côté Anglais on est fébrile. 12 Swordfishs tournent au dessus du naufrage.
Ils devaient lancer des torpilles, mais le feu à été tel qu’ils n’ont pu prendre le risque de piquer dans cet enfer.
Au bout d’une heure de tir ininterrompu à bord du Rodney et du King Georges V il y a autant de dégâts que si le Bismarck les avait touchés.
Les canons du King sont tombés en panne et il y a des meubles brisés sur tout le navire. A bord du Rodney c’est pire encore, tous les canons de gros calibre ont sautés hors de leurs affuts et les carrelages sont brisés ainsi que les meubles et la vaisselle. Les ponts sont défoncés, les rivets desserrés. Il y a des fuites d’eau partout.
A court de carburant l’amiral Tovey jette l’éponge et décide de rentrer. Il laisse au destroyer Maori et au croiseur Dorsetshire le soin de recueillir les survivants.
La mer est trop forte pour mettre des embarcations à la mer. Sur le Dorsetshire on lance des filins. Au milieu des nappes de mazout et dans une eau à 13 degrés, les survivants se battent pour s’agripper aux filins. L’huile rend les cordes glissantes.
Müllenheim Rechberg à la chance de trouver une boucle et glisse son pied dedans. Josef Stratz cherche son ami Friedrich Cardinal dans la mer et le trouve enfin. Mais l’homme s’est suicidé dans l’eau. Franz Halke est sauvé par le Maori. Junack et Adolf Eich réussissent à grimper à bord du Dorsetshire.
Craignant la présence des sous marins, les 2 navires mettent en route. S’ensuit une des scènes les plus terribles de la seconde guerre mondiale. Des marins allemands accrochés aux filins hurlent et griffent les coques en suppliant de les hisser à bord. Un marin qui avait réussit avec ses deux bras coupés à s’agripper avec ses dents a un filin se débat comme un diable. Un marin Anglais au péril de sa vie descend le long du bord et tente de le sauver, mais doit remonter à bord et subit une mesure disciplinaire.
Longtemps les cris et suppliques de ces marins hanterons les Anglais.
Seuls 110 hommes du Bismarck furent sauvés.
Devant de tels actes de courage on ne peut que rendre hommage à ces marins Anglais et Allemands qui se sacrifièrent pour leurs pays.
Surcouf 2010.
Naufragés du Bismarck (collection personnelle)
Sources principales: la découverte du Bismarck par Robert D Ballard et Rick Archbold éditions Glénat.
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