Ca a évolué, car beaucoup de navire ont été construits à partir des années 1990 en Corée du Sud, jusqu'à 50% de la flotte mondiale. Les coréens ont apporté une rationalisation de la disposition des machines et des nombreux circuits de tuyaux qui les composent, en clair, tous ces navires se ressemblent beaucoup, les différences viennent du type de navire, il y aura plus ou moins d'appareils dans la machine ou sur le pont. Mais il reste des différences notables en ce qui concerne les automatismes, d'une part à cause du fabriquant qui peut être européen ou asiatique, et du niveau de sophistications des automatismes.
Donc quoi qu'il en soit, les 2 premières semaines, quand tu embarques, la règle est de connaitre quasi par coeur les circuits, et leurs vannes, leur fonction exacte, ce qu'il véhicule comme fluide. Tu dois connaitre tes gammes en clair. Car lors de situation d'urgence, c'est primordial pour réagir vite et savoir quoi ouvrir ou fermer.
Au bout de 2 mois tu connais normalement parfaitement chaque tuyau, à quoi il sert et où il va. C'est plus facile sur les navires coréens ou chinois maintenant ( plans coréens ). Chaque fluide à un code couleur peint sur le tuyau. Chaque vanne à une plaque sur son volant qui décrit succinctement sa fonction. Ca aide au début.
Après sur le navires des chantiers européens chacun fait à sa sauce bien souvent. Donc à chaque fois, il faut repartir de presque zéro sauf si tu navigues sur des navires fabriqués dans le même chantier où là il y a des similitudes.
J'ai navigué sur des navires des chantiers de l'Atlantique dans les années 1970, chaque navire type était différent, quasi des prototypes à chaque fois, même sur des sisters ships. Sur chaque navire, le chantier apportait son lot de modifications, judicieuses ou pas d'ailleurs. J'ai navigué sur un gros pétrolier sur lequel l'automatisme n'avait jamais fonctionné ( C'était vraiment le début faut dire ), il était donc prévu pour fonctionner avec un officier en moins à la machine à la base, ce qui n'a jamais été le cas. Il a fallu faire le quart 24 sur 24. Personne n'a jamais réussi à faire fonctionner cette "usine à gaz", peu fiable. Il y a eu quelques ratés comma ça. Mais la concurrence étrangére a fait que ça s'est amélioré.
Les japonais à l'époque avaient déjà une approche différente de l'automatisme et des navires. C'était vraiment testé en amont chez le fournisseur et ça devait fonctionner avant montage à bord, sinon ils passaient à autre chose (sous-traitant). Des navires de grande qualité.
Après la connaissance des tuyaux et des appareils machine, c'est une chose, mais le gros morceau, c'est l'automatisme à bord, ça comprend du pneumatique, de l'électricité, de l'électronique et de l'informatique. Il faut savoir apprendre vite dans ce domaine et connaitre bien chaque système pour pouvoir réparer éventuellement rapidement car parfois le temps presse et avoir suffisamment de pièces de rechange à bord. Là en général, on est dans le domaine de l'électricien et du chef mécanicien.
Et Il n'y a pas que la machine, mais aussi la partie cargaison, PC cargo, capteurs sur le ponts etc, plus la passerelle avec ses équipements de navigation, radars, gps, VHF, gyrocompas, satcom etc.. et de conduite du navire passerelle, automatisme passerelle moteur, barre, feux de route.
Je rajouterais le ou les ascenseurs, les machines à laver le linge industrielles, les sèche-linges, la climatisation, le chauffage, les fourneaux de la cuisine et ses différents appareils, les chambres froides, les toilettes, douches dans les 30 cabines, l'éclairage. Tout ça doit fonctionner et être entretenu dans les règles. On est 10 à la machine, officiers compris, sur un gros navire.
Officier :Un chef, un second mécanicien, un troisième mécanicien, un quatrième mécanicien, un élève officier parfois.
Puis le personnelle d'exécution, un électricien, un maitre machine (soudeur, tourneur), 3 ouvriers mécaniciens (On les appelait les graisseurs dans le temps), et un nettoyeur.
Il faut se dire qu'on est livré à soi-même, il peut nous arriver de faire 2 semaines de navigation sans voir la terre, il ne faut pas compter trouver un "quincaillé" sur la route pour se fournir en bricole. Tout ça il faut le prévoir en amont lors des escales avec les fournisseurs, et avoir un bon magasin de pièces de rechange à bord ou de la matière pour les fabriquer si possible et réparer nous-mêmes avec nos machines outils.
Il n'y qu'un seul moteur à bord sur beaucoup de navire, quand tu es au milieu de nulle part, il faut réparer impérativement. Le mécanicien à bord d'un navire, c'est un couteau-suisse..
C'est une équipe très soudée en général, mieux vaut, car en cas de coup dur il faut pouvoir compter sur chacun pour réparer, ça peut être long et éprouvant par 42°c à la machine sous les tropiques avec l'humidité qui va avec, le bruit, le roulis, les odeurs de fuel, d'huile et cela pendant parfois plus de 10 heures d'affilées.