Bonsoir Fox,
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi sur ce point.
Les américains ont une énorme tradition maritime (ils sont arrivés par la mer, leur anglais usuel est truffé d'expression maritimes),
sans commune mesure avec nos traditions de terriens.
Ils ont conservés une très grande quantité de navires du XXe Siècle (7 cuirassés, 4 porte avions, plein d'unités plus petites et j'en oublie certainement), mais ceci a été le fait de la génération qui est en train de disparaitre, celle qui a vécu la Seconde Guerre Mondiale sur mer (je rappelle que l'USN a terminé avec une flotte de 600 unités).
Et surtout, c'est cette génération qui a financé ces musées
entièrement sur fonds privés, une pratique qu'on ose seulement aborder en France.
Actuellement, cette génération passe la main à la suivante, beaucoup moins motivée.
En même temps, le coût d'entretien de ces coques flottantes devient complètement dingue avec la triste réalité : l'eau salée attaque l'acier des carènes et il va falloir dans très peu d'années soit mettre ces navires au sec... soit les démolir.
Le premier à subir ce sort est le cuirassé Texas, 100ans l'année prochaine, qui a déjà commencé à couler dans son bassin. Trop faible pour supporter d'être mis au sec, la coque commence à s'effondrer sur elle même. Il faut le sortir de son bassin et l'envelopper dans un berceau de béton, mais cela va coûter plus de 75 millions de dollars... et les sponsors se font rares. Tu imagines si la facture doit être la même pour les autres grosses bailles?
L'Intrepid (le porte-avions que tu as vu à New York) a été sauvé de justesse il y a trois ans, mais le coût a fait réfléchir beaucoup de monde et il se pourrait que la prochaine fois...
Le Saratoga (celui de la classe Forrestal) a été un temps en passe de devenir musée, mais le morceau était trop copieux et il vient de partir à la casse.
Les américains ont aussi leur "loupé" : ils ont laissé partir l'Enterprise (CV-6) à la casse en 1958 : le gouvernement ne voulait pas financer une mise en musée et les fonds privés n'étaient pas au rendez-vous.
Je pronostique la fermeture de nombreux musées flottant et la démolition des bateaux dans les vingt ans qui viennent... juste parce que ça coûte cher et que la génération qui se sent concernée par eux disparait peu à peu.
Les japonais ,eux, se sont méfiés : leur Mikasa de 1905 est au sec dans une "mer" en gravier depuis plus de soixante ans. Idem pour le Victory de Nelson qui est en cale, sur tins depuis le XIXe Siècle.
En France, on fait ce qu'on peut, avec une tradition navale beaucoup moins présente. Je rappelle qu'après la guerre de 1870 la marine française a failli disparaitre, tout simplement, au profit de l'armée de terre.
J'ai vécu les aventures du croiseur Colbert (j'étais membre de l'association qui l'a fait venir à Bordeaux). Il est venu à Bordeaux suite à l'action de quelques fondus qui ont su convaincre le maire de l'époque (Chaban) et surtout parce que ni Toulon ni Brest n'en voulaient. Il est arrivé repeint à neuf par la Marine, mais on sait tous qu'un bateau doit être repeint en permanence et après quelques années les frais d'entretien sont devenus dingues aussi.
De plus, un bateau transformé en musée, ça ne change pas beaucoup à l'intérieur et les mêmes visiteurs ne reviennent pas souvent ou plus du tout. Avec plus de 20 visites, je suis dans les exceptions, mais c'était en accompagnant des scolaires. Alors forcément, on se lasse et on ne vient plus. Passé un pic d'intérêt initial, le musée flottant entre dans un régime de croisière dont les ressources sont incompatibles avec les frais d'entretien qui, eux, s'envolent.
Il y a le contre exemple (le miracle ?) du Maillé-Brézé à Nantes. Mais que se passera-t-il quand la corrosion de la coque sera trop avancée?
On touche du bois (sans jeu de mot) avec l’Hermione. Tenir le projet pendant les 17 ans de construction était une gageure, mais si on réfléchit bien c'était jouable : en revenant visiter au moins une fois par an, on voyait sa construction progresser. Le challenge, maintenant, ça va être de le maintenir à flot financièrement quand les confettis de son voyage héroïque seront retombés. Certes il participera au rendez-vous de grands voiliers, sauf qu'à chaque fois il faudra le soustraire au public le temps de le préparer, le réparer et d'entrainer un équipage. J'espère que ça a été bien anticipé. Je ne sais pas si je viendrai la visiter tous les ans pour voir exactement la même chose.
Alors je veux bien qu'on conserve le patrimoine pour le droit à mémoire... mais tout ça coûte très très cher. Luxe de pays riche, non ?
Et si par chance on conserve un autre bateau dans le futur, par pitié : mettons-le au sec tout de suite, comme le Redoutable et l'Argonaute. Là, au moins on va rendre l'entretien plus supportable.
_Bruno
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Hi Bob!
C'est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases
Si Vis Pacem Parafilmum
La sous-couche, c'est un apprêt que l'on met avant
Si on bricolait plus souvent on aurait moins la tête aux bêtises
Omnes stulti, et deliberationes non utentes, omnia tentant
Une journée au cours de laquelle on n'a pas ri est une journée perdue
Espérons que le fond de la mer est étanche
Oh, ça c'est le Quacta qui se moque du Stifling
Telle est la Voie !