Bonjour
Voici ma participation au Group Build « Porte-avions » lancé voici neuf mois maintenant.
J’ai choisi un montage modifié du projet de porte-avions américain USS United States de 1948.
Le porte-avions américain United States, mis sur cale en 1948 et dont la construction fut abandonnée presque aussitôt, est le "chainon manquant" entre les PA du type Midway, conçus en 1940 et les "supercarriers" de la classe Forrestal mis en chantier en 1950 avec tous les enseignements de la Seconde Guerre Mondiale.
Ce navire est, pour les passionnés d'histoire navale, intéressant au moins à trois titres :
- C'est le chainon manquant
- C'est la première application en grand des principes hérités de la guerre
- C'est le premier PA conçu à l'ère atomique, c'est à dire capable d'embarquer des avions à capacité nucléaire. Il allait de pair avec le programme d'avion d'attaque à longue portée établi par l'US Navy en 1948 et qui a donné lieu à pas moins de douze projets qui trouveraient aisément leur place dans un film de SF. Le seul d'entre eux à survivre fut le Douglas A3-D Skywarrior, "the Whale" (la baleine).
Un petit rappel de la genèse de ce projet :
1945 : fin de la guerre dans le Pacifique et prémices de la Guerre Froide. Les USA sortirent du conflit avec une grande flotte de porte-avions bien rodée et organisée, mais qui coûtait extrêmement cher à utiliser. Trop cher. La crise économique aidant, ils en mirent la majorité sous cocon en attendant démolition.
La bombe atomique avait eu pour conséquence de raviver la rivalité entre la toute nouvelle armée de l'air (USAF), l’ex USAAF qui venait de gagner son indépendance de l’US Army et la Navy pour la projection des forces à longue distance.
L'USAF affirma qu'avec ses flottes de B-29, B-50 et B-36 et la bombe A il n'y avait plus besoin de la Navy, trop coûteuse, pour se projeter dans une guerre éloignée.
Alors que le budget de la défense US diminuait, l'USAF qui venait de créer le SAC en 1947 voulut se « servir sur la bête » en sacrifiant la Navy. Les successeurs des Midway en firent les frais dans un premier temps.
La Navy essaya de réagir en prouvant qu'elle pouvait aligner un PA à capacité nucléaire de longue portée. Elle lança alors l'étude d'un navire assez gros pour embarquer des avions d'attaque à grand rayon d'action et capacité nucléaire (programme de 1948).
La lutte entre les deux armes devint intense et la Navy était en état d'infériorité. La "révolte des amiraux", avec la démission de nombre d'entre eux dramatisa un peu la situation.
La Guerre de Corée sauva la situation du point de vue de la Navy : les premiers à arriver sur place furent les rares PA de type Essex pas encore promis à la démolition et les interventions de leurs groupes aériens endiguèrent la poussée Nord-Coréenne, donnant le temps aux Alliés de réagir.
Puis des escadrilles de la Navy parvinrent à intercepter et virtuellement détruire une escadre de B-36 et le gouvernement réinstalla la construction de porte-avions : ce fut le Forrestal, bâti sur les "restes" de l’United States.
Pour un scratcheur fou comme moi, c'est un terrain idéal pour s'éclater en détaillant la grosse bête à l'envi.
Je précise "grosse" car ce navire avait exactement les dimensions adoptées ensuite pour les Forrestal. Au 700e cela fait un barreau de résine de 44,5cm de longueur
Entre 1947 et 1948 un nombre de projets et variantes seront étudiés par le Bureau of Ships. Le kit s'inspire du projet n°6 dont voici un plan (source : NARA)
Quatre ascenseurs et deux cheminées coudées à l'horizontale, une de chaque côté. Avec le gigantisme des Midway qui demandaient plus de 90mn pour mettre en l'air l'ensemble du groupe aérien, la nécessité se faisait d'augmenter le nombre d'ascenseurs en les passant de trois à quatre. Il faudra attendre.... 2011 pour qu'on revienne à trois ascenseurs avec la classe Ford grâce à une diminution du nombre d'avion et une optimisation poussée de la gestion des mouvements.
L'armement est un mix de tourelles de 127mm, simples (style Midway) et double (design plus récent qu'on retrouve sur les navires contemporains - USS Norfolk) :
Pour dégager le pont d'envol, l'ilot est décomposé en deux structures symétriques situées sous le niveau du pont et de chaque côté, auxquelles s'ajoute une petite passerelle d'opération aériennes télescopique qui se rétracte pendant les opérations. À noter que ce concept sera adopté initialement sur le Forrestal, mais bientôt remplacé par un ilot "classique" avec un mât repliable après la mise sur cale.
Dans le projet initial que je veux reproduire ici l’United States était un porte-avions stratégique, c'est-à-dire essentiellement équipé de bombardiers nucléaires. Pas d’armement propre, pas d’équipement radar : il devait reposer entièrement sur son escorte.
La mesure était peut-être un peu trop audacieuse et il fut bientôt décidé d’embarquer une chasse de protection (Combat Air Patrol ou CAP) ainsi qu’un armement défensif de proximité, assez léger tout de même.
Le navire étant un « Never-were » (qui n’a jamais existé) j’ai voulu, une fois n’est pas coutume, le présenter hors de l’eau, c'est-à-dire en pleine coque reposant sur tins. Et cela tombait à point car j’avais à ma disposition une photo du vrai à l’époque de son abandon qui montrait parfaitement l’arrangement de la cale de construction :
Il fallait donc reconstituer la carène pour laquelle je ne disposais que du profil (le plan ci-dessus), mais aussi pas mal d’infos dans le livre de Norman Friedmann sur la conception et le développement des porte-avions américain, toujours considéré comme la « bible » dans ce domaine.
Tout d’abord, le Forrestal reprit les plans généraux de l’United States… j’en ai déduit que cela aurait du sens de reprendre les mêmes lignes d’eau. Je me suis procuré les couples du Forrestal (au Floating Drydock) et je les ai décalqués dans mon logiciel préféré :
Cependant la carène diffère à l’arrière : celle du Forrestal revient au schéma classique de la quille unique, alors que le profil de l’United States montre clairement un double talon de quille (twin skeg) comme on trouve sur les cuirassés North Carolina, South Dakota, Iowa et Montana et le porte-avions Midway (encore que celui de ce dernier soit vraiment tout petit à côté des autres).
Les deux talons de quille englobent chacun un des quatre arbres d’hélice… mais lesquels ? Les arbres internes, comme sur les North Carolina, Missouri, Midway et Montana ou les arbres externes comme sur les South Dakota ?
Je me suis intéressé à la raison de ces doubles talons de quille. Friedmann explique bien la genèse de cette option et un parallèle évident m'est apparu entre les South Dakota et l’United States.
Le South Dakota : ce design plus compact que le North Carolina, avec une coque plus courte, impliquait une vitesse moindre à déplacement et puissance égaux (plus un navire est long et effilé, plus il avance vite pour une puissance donnée).
Une compensation efficace consistait à dessiner une coque moins profonde dans l’eau à l’arrière pour diminuer la trainée. Mais comme la coque était moins profonde, il fallait l’élargir pour y faire rentrer une soute à munition assez vaste pour la tourelle arrière. On obtenait le bon effet mais avec une structure lourde et peu épaisse, propice à l’affaissement par grosse mer et en cale sèche… d’où l’idée de la rigidifier et de la soutenir (au sec) avec deux quilles parallèles. Sur le South Dakota, les quilles englobaient les arbres externes, gardant les deux arbres internes à l’abri des torpilles.
Ici une vue de l’Indiana sur cale : on voit bien les deux quilles qui portent les arbres externes et les deux arbres internes dans le « tunnel » central. Noter les hélices qui n’ont pas le même nombre de pales pour atténuer les vibrations de résonance… une idée que je vais reprendre sur l’United States.
L’United States : de la même façon une nécessité d’avoir une grande vitesse car les avions envisagés allaient être très lourds. L’inclusion d’une chasse de protection avait entrainé une division du parc aérien et des soutes d’armement : les bombardiers et leurs armes nucléaires à l’avant et les chasseurs à l’arrière. Il y avait donc une forte concentration de poids sur la poupe… et la nécessité d’un meilleur appui grâce… à deux quilles parallèles. CQFD.
Je tenais donc ma solution : deux quilles parallèles portant les arbres externes, deux gouvernails et des hélices à nombre de pale différent.
J’ai donc modifié les couples arrière pour inclure les deux talons :
Puis j’ai composé une planche de photo découpe que j’ai fait graver dans du laiton de 2/10e :
Je vais utiliser une méthode que je maitrise maintenant très bien pour générer une carène aux petits oignons.
Le principe :
Je remplis les espaces entre les couples avec des blocs sciés dans de la planche de prototypage (LAB) et collés à la cyano. Il s’agit d’une résine chargée de silice qui est homogène dans toutes les directions et possède les qualités du balsa (facile à tailler, limer, poncer) sans les inconvénients (pas fibreux, bien rigide, insensible à l’eau et stable dans le temps).
L’ensemble est maintenant collé. Je comble un peu les « jours » avec de la cyano en fin de vie (légèrement pâteuse) pour renforcer l’ensemble.
Une bande d’adhésif de masquage sur la partie résine pour la protéger lors du ponçage et je passe à l’étape suivante.
Ensuite je ponce pour former la carène « au bruit » et « au toucher ». La planche de prototypage étant plus tendre que le laiton je ponce sous un filet d’eau jusqu’à ce que j’atteigne les couples en métal. Le papier de verre va alors produire un son différent (de crouich-crouich on va passer à grouing-grouing) ainsi qu’un ressenti au toucher différent et je sais alors que je suis « arrivé ». Avec cette méthode j’obtiens une précision des formes de l’ordre de 0,05mm SANS JAMAIS prendre une seule mesure ni rien contrôler avec un quelconque gabarit. Génial, non ?
Quand la carène est formée, j’étale dessus du mastic Tamiya au doigt et je reprends le ponçage avec la même méthode. Puis encore et encore jusqu'au fini impeccable.
Les appendices maintenant. A l'origine j'étais parti pour récupérer des hélices et chaises d'hélice Trumpeter à partir du kit du cuirassé Massachusetts, mais elles se sont révélées trop petites en diamètre et assez épaisses. Pour la première fois alors j’ai décidé de tester des pièces en impression 3D dessinées et imprimées « maison ».
Les dessins d’abord. Pour les hélices, le diamètre tiré du plan est de 7,5mm. J’ai opté, comme pour les grosses unités américaines de l’époque pour deux hélices à quatre pales et deux à cinq pales. Ce système monté depuis les cuirassés South Dakota permettait de supprimer les vibrations de résonance dues à l’interférence entre les hélices. Pour les deux hélices internes j’ai dessiné les arbres et chaises. Puis deux gouvernails et enfin la forme un peu complexe des talons de quille.
Après impression, voici le résultat qui dépasse toutes mes espérances. Un léger ponçage des bords des pales suffira avant peinture.
La mise en place des deux talons de quille :
C’est à ce moment que la coque a décidé de faire le saut de l’ange de mon bureau (105cm) sur le plancher…
À l’atterrissage la carène s’est décollée en se brisant en trois morceaux et les deux talons de quille ont sauté quelque part dans la pièce. Après 20mn de recherche à 4 pattes j’en ai retrouvé un cassé en deux et inutilisable. Le second est introuvable et se trouve probablement dans une dimension parallèle.
Après le traditionnel cri primal qui calme (Rôôônntudjuuuuu-Kelkonkelkonkelkonkelkon !!!), j’ai recollé la carène à l’araldite et réimprimé deux talons de quille. Il reste à repolir tout le bestiau. La suite dans une semaine…
En attendant je finis de me calmer en dessinant le deuxième navion zarbi qui va aller sur cette baille : un Convair LRSA (Long Range Special Attack), bombardier nucléaire supersonique et composite complètement improbable.
… à suivre, donc…
_Bruno
_________________
Hi Bob!
C'est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases
Si Vis Pacem Parafilmum
La sous-couche, c'est un apprêt que l'on met avant
Si on bricolait plus souvent on aurait moins la tête aux bêtises
Omnes stulti, et deliberationes non utentes, omnia tentant
Une journée au cours de laquelle on n'a pas ri est une journée perdue
Espérons que le fond de la mer est étanche
Oh, ça c'est le Quacta qui se moque du Stifling
Telle est la Voie !
Voici ma participation au Group Build « Porte-avions » lancé voici neuf mois maintenant.
J’ai choisi un montage modifié du projet de porte-avions américain USS United States de 1948.
Le porte-avions américain United States, mis sur cale en 1948 et dont la construction fut abandonnée presque aussitôt, est le "chainon manquant" entre les PA du type Midway, conçus en 1940 et les "supercarriers" de la classe Forrestal mis en chantier en 1950 avec tous les enseignements de la Seconde Guerre Mondiale.
Ce navire est, pour les passionnés d'histoire navale, intéressant au moins à trois titres :
- C'est le chainon manquant
- C'est la première application en grand des principes hérités de la guerre
- C'est le premier PA conçu à l'ère atomique, c'est à dire capable d'embarquer des avions à capacité nucléaire. Il allait de pair avec le programme d'avion d'attaque à longue portée établi par l'US Navy en 1948 et qui a donné lieu à pas moins de douze projets qui trouveraient aisément leur place dans un film de SF. Le seul d'entre eux à survivre fut le Douglas A3-D Skywarrior, "the Whale" (la baleine).
Un petit rappel de la genèse de ce projet :
1945 : fin de la guerre dans le Pacifique et prémices de la Guerre Froide. Les USA sortirent du conflit avec une grande flotte de porte-avions bien rodée et organisée, mais qui coûtait extrêmement cher à utiliser. Trop cher. La crise économique aidant, ils en mirent la majorité sous cocon en attendant démolition.
La bombe atomique avait eu pour conséquence de raviver la rivalité entre la toute nouvelle armée de l'air (USAF), l’ex USAAF qui venait de gagner son indépendance de l’US Army et la Navy pour la projection des forces à longue distance.
L'USAF affirma qu'avec ses flottes de B-29, B-50 et B-36 et la bombe A il n'y avait plus besoin de la Navy, trop coûteuse, pour se projeter dans une guerre éloignée.
Alors que le budget de la défense US diminuait, l'USAF qui venait de créer le SAC en 1947 voulut se « servir sur la bête » en sacrifiant la Navy. Les successeurs des Midway en firent les frais dans un premier temps.
La Navy essaya de réagir en prouvant qu'elle pouvait aligner un PA à capacité nucléaire de longue portée. Elle lança alors l'étude d'un navire assez gros pour embarquer des avions d'attaque à grand rayon d'action et capacité nucléaire (programme de 1948).
La lutte entre les deux armes devint intense et la Navy était en état d'infériorité. La "révolte des amiraux", avec la démission de nombre d'entre eux dramatisa un peu la situation.
La Guerre de Corée sauva la situation du point de vue de la Navy : les premiers à arriver sur place furent les rares PA de type Essex pas encore promis à la démolition et les interventions de leurs groupes aériens endiguèrent la poussée Nord-Coréenne, donnant le temps aux Alliés de réagir.
Puis des escadrilles de la Navy parvinrent à intercepter et virtuellement détruire une escadre de B-36 et le gouvernement réinstalla la construction de porte-avions : ce fut le Forrestal, bâti sur les "restes" de l’United States.
Pour un scratcheur fou comme moi, c'est un terrain idéal pour s'éclater en détaillant la grosse bête à l'envi.
Je précise "grosse" car ce navire avait exactement les dimensions adoptées ensuite pour les Forrestal. Au 700e cela fait un barreau de résine de 44,5cm de longueur
Entre 1947 et 1948 un nombre de projets et variantes seront étudiés par le Bureau of Ships. Le kit s'inspire du projet n°6 dont voici un plan (source : NARA)
Quatre ascenseurs et deux cheminées coudées à l'horizontale, une de chaque côté. Avec le gigantisme des Midway qui demandaient plus de 90mn pour mettre en l'air l'ensemble du groupe aérien, la nécessité se faisait d'augmenter le nombre d'ascenseurs en les passant de trois à quatre. Il faudra attendre.... 2011 pour qu'on revienne à trois ascenseurs avec la classe Ford grâce à une diminution du nombre d'avion et une optimisation poussée de la gestion des mouvements.
L'armement est un mix de tourelles de 127mm, simples (style Midway) et double (design plus récent qu'on retrouve sur les navires contemporains - USS Norfolk) :
Pour dégager le pont d'envol, l'ilot est décomposé en deux structures symétriques situées sous le niveau du pont et de chaque côté, auxquelles s'ajoute une petite passerelle d'opération aériennes télescopique qui se rétracte pendant les opérations. À noter que ce concept sera adopté initialement sur le Forrestal, mais bientôt remplacé par un ilot "classique" avec un mât repliable après la mise sur cale.
Dans le projet initial que je veux reproduire ici l’United States était un porte-avions stratégique, c'est-à-dire essentiellement équipé de bombardiers nucléaires. Pas d’armement propre, pas d’équipement radar : il devait reposer entièrement sur son escorte.
La mesure était peut-être un peu trop audacieuse et il fut bientôt décidé d’embarquer une chasse de protection (Combat Air Patrol ou CAP) ainsi qu’un armement défensif de proximité, assez léger tout de même.
Le navire étant un « Never-were » (qui n’a jamais existé) j’ai voulu, une fois n’est pas coutume, le présenter hors de l’eau, c'est-à-dire en pleine coque reposant sur tins. Et cela tombait à point car j’avais à ma disposition une photo du vrai à l’époque de son abandon qui montrait parfaitement l’arrangement de la cale de construction :
Il fallait donc reconstituer la carène pour laquelle je ne disposais que du profil (le plan ci-dessus), mais aussi pas mal d’infos dans le livre de Norman Friedmann sur la conception et le développement des porte-avions américain, toujours considéré comme la « bible » dans ce domaine.
Tout d’abord, le Forrestal reprit les plans généraux de l’United States… j’en ai déduit que cela aurait du sens de reprendre les mêmes lignes d’eau. Je me suis procuré les couples du Forrestal (au Floating Drydock) et je les ai décalqués dans mon logiciel préféré :
Cependant la carène diffère à l’arrière : celle du Forrestal revient au schéma classique de la quille unique, alors que le profil de l’United States montre clairement un double talon de quille (twin skeg) comme on trouve sur les cuirassés North Carolina, South Dakota, Iowa et Montana et le porte-avions Midway (encore que celui de ce dernier soit vraiment tout petit à côté des autres).
Les deux talons de quille englobent chacun un des quatre arbres d’hélice… mais lesquels ? Les arbres internes, comme sur les North Carolina, Missouri, Midway et Montana ou les arbres externes comme sur les South Dakota ?
Je me suis intéressé à la raison de ces doubles talons de quille. Friedmann explique bien la genèse de cette option et un parallèle évident m'est apparu entre les South Dakota et l’United States.
Le South Dakota : ce design plus compact que le North Carolina, avec une coque plus courte, impliquait une vitesse moindre à déplacement et puissance égaux (plus un navire est long et effilé, plus il avance vite pour une puissance donnée).
Une compensation efficace consistait à dessiner une coque moins profonde dans l’eau à l’arrière pour diminuer la trainée. Mais comme la coque était moins profonde, il fallait l’élargir pour y faire rentrer une soute à munition assez vaste pour la tourelle arrière. On obtenait le bon effet mais avec une structure lourde et peu épaisse, propice à l’affaissement par grosse mer et en cale sèche… d’où l’idée de la rigidifier et de la soutenir (au sec) avec deux quilles parallèles. Sur le South Dakota, les quilles englobaient les arbres externes, gardant les deux arbres internes à l’abri des torpilles.
Ici une vue de l’Indiana sur cale : on voit bien les deux quilles qui portent les arbres externes et les deux arbres internes dans le « tunnel » central. Noter les hélices qui n’ont pas le même nombre de pales pour atténuer les vibrations de résonance… une idée que je vais reprendre sur l’United States.
L’United States : de la même façon une nécessité d’avoir une grande vitesse car les avions envisagés allaient être très lourds. L’inclusion d’une chasse de protection avait entrainé une division du parc aérien et des soutes d’armement : les bombardiers et leurs armes nucléaires à l’avant et les chasseurs à l’arrière. Il y avait donc une forte concentration de poids sur la poupe… et la nécessité d’un meilleur appui grâce… à deux quilles parallèles. CQFD.
Je tenais donc ma solution : deux quilles parallèles portant les arbres externes, deux gouvernails et des hélices à nombre de pale différent.
J’ai donc modifié les couples arrière pour inclure les deux talons :
Puis j’ai composé une planche de photo découpe que j’ai fait graver dans du laiton de 2/10e :
Je vais utiliser une méthode que je maitrise maintenant très bien pour générer une carène aux petits oignons.
Le principe :
Je remplis les espaces entre les couples avec des blocs sciés dans de la planche de prototypage (LAB) et collés à la cyano. Il s’agit d’une résine chargée de silice qui est homogène dans toutes les directions et possède les qualités du balsa (facile à tailler, limer, poncer) sans les inconvénients (pas fibreux, bien rigide, insensible à l’eau et stable dans le temps).
L’ensemble est maintenant collé. Je comble un peu les « jours » avec de la cyano en fin de vie (légèrement pâteuse) pour renforcer l’ensemble.
Une bande d’adhésif de masquage sur la partie résine pour la protéger lors du ponçage et je passe à l’étape suivante.
Ensuite je ponce pour former la carène « au bruit » et « au toucher ». La planche de prototypage étant plus tendre que le laiton je ponce sous un filet d’eau jusqu’à ce que j’atteigne les couples en métal. Le papier de verre va alors produire un son différent (de crouich-crouich on va passer à grouing-grouing) ainsi qu’un ressenti au toucher différent et je sais alors que je suis « arrivé ». Avec cette méthode j’obtiens une précision des formes de l’ordre de 0,05mm SANS JAMAIS prendre une seule mesure ni rien contrôler avec un quelconque gabarit. Génial, non ?
Quand la carène est formée, j’étale dessus du mastic Tamiya au doigt et je reprends le ponçage avec la même méthode. Puis encore et encore jusqu'au fini impeccable.
Les appendices maintenant. A l'origine j'étais parti pour récupérer des hélices et chaises d'hélice Trumpeter à partir du kit du cuirassé Massachusetts, mais elles se sont révélées trop petites en diamètre et assez épaisses. Pour la première fois alors j’ai décidé de tester des pièces en impression 3D dessinées et imprimées « maison ».
Les dessins d’abord. Pour les hélices, le diamètre tiré du plan est de 7,5mm. J’ai opté, comme pour les grosses unités américaines de l’époque pour deux hélices à quatre pales et deux à cinq pales. Ce système monté depuis les cuirassés South Dakota permettait de supprimer les vibrations de résonance dues à l’interférence entre les hélices. Pour les deux hélices internes j’ai dessiné les arbres et chaises. Puis deux gouvernails et enfin la forme un peu complexe des talons de quille.
Après impression, voici le résultat qui dépasse toutes mes espérances. Un léger ponçage des bords des pales suffira avant peinture.
La mise en place des deux talons de quille :
C’est à ce moment que la coque a décidé de faire le saut de l’ange de mon bureau (105cm) sur le plancher…
À l’atterrissage la carène s’est décollée en se brisant en trois morceaux et les deux talons de quille ont sauté quelque part dans la pièce. Après 20mn de recherche à 4 pattes j’en ai retrouvé un cassé en deux et inutilisable. Le second est introuvable et se trouve probablement dans une dimension parallèle.
Après le traditionnel cri primal qui calme (Rôôônntudjuuuuu-Kelkonkelkonkelkonkelkon !!!), j’ai recollé la carène à l’araldite et réimprimé deux talons de quille. Il reste à repolir tout le bestiau. La suite dans une semaine…
En attendant je finis de me calmer en dessinant le deuxième navion zarbi qui va aller sur cette baille : un Convair LRSA (Long Range Special Attack), bombardier nucléaire supersonique et composite complètement improbable.
… à suivre, donc…
_Bruno
_________________
Hi Bob!
C'est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases
Si Vis Pacem Parafilmum
La sous-couche, c'est un apprêt que l'on met avant
Si on bricolait plus souvent on aurait moins la tête aux bêtises
Omnes stulti, et deliberationes non utentes, omnia tentant
Une journée au cours de laquelle on n'a pas ri est une journée perdue
Espérons que le fond de la mer est étanche
Oh, ça c'est le Quacta qui se moque du Stifling
Telle est la Voie !