FOCH :
Le Foch fut le produit d’un véritable miracle auprès duquel l’actuelle polémique sur le second P.A. devant soutenir le Charles de Gaulle peut paraître une plaisanterie.
Si le budget voté pour l’année 1954 avait enfin autorisé la construction du Clemenceau, rien n’était prévu pour le Foch.
Pour tourner l’obstacle, le Parlement décida de reconduire purement et simplement le budget pour l’année suivante, feu vert implicite à la mise en chantier du second P.A.
Sister-ship du Clemenceau, sa construction débuta en février 1957 dans la cale Jean Bart des Chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire. Le 13 juillet 1959, pour harmoniser les plans de charge, surtout en fait pour laisser le leadership à une structure étatisée et ne pas démontrer la différence de cadence de travail, la coque inachevée fut remorquée jusqu’à Brest où l’arsenal termina la construction, cette péripétie n’ayant sans doute pas contribué à faire des économies sur ce projet.
Sa finition sera retardée par les éternels problèmes budgétaires français et les essais à la mer commencèrent seulement le 28 avril 1962, son admission au service actif étant prononcée le 15 juillet 1963. Contrairement à son jumeau, il comportait, depuis sa mise en chantier, des contre carènes latérales.
Les fonds du bâtiment étaient occupés par la salle des machines, les soutes à fioul, les citernes de carburant aviation pour un total de 3000 m3, les soutes à munitions (missiles, artillerie de bord et munitions aviation) et les cambuses contenant deux mois de nourriture pour 1900 personnes, dont 86 000 litres de vin.
En 1980/81, il subira une importante refonte de ces soutes et ateliers d’armement aéronautique, pour cause de mise à bord de l’arme nucléaire tactique, le chantier profitant aussi à l’habitabilité générale, largement dépassée et au central « informations » du P.A., avec l’installation du S.E.N.I.T 2 (Système d’Exploitation Navale des Informations Tactiques).
Au-dessus, au pont principal et au 1er pont, se trouvaient les locaux administratifs et les logements, les trois ponts supérieurs étant réservés pour le logement des personnels Opérations et Aviation et pour les locaux techniques et défense.
La puissance propulsive est de 63000 ch par groupe de turbines : deux groupes (de TE Parsons) et non quatre ; totalisant 126000 ch.Les groupes comprenaient chacun une turbine haute pression (HP), deux turbines moyenne pression (MP) et une basse pression (BP) à double flux ; ce qui fait bien quatre turbines ; mais de marche avant, car il faut y ajouter une turbine HP et une turbine BP pour la marche arrière. Au total six turbines par groupe (ou par ligne d'arbres) ; soit douze turbines pour l'ensemble de la propulsion., le mouvement étant transmis à deux hélices de 5,5 mètres de diamètre pesant 20 tonnes chacune, par deux lignes d’arbres tournant à 190 t/mn.
L’alimentation en vapeur s’effectuait par six chaudières principales réparties dans les deux chaufferies, pouvant consommer 40 tonnes de fioul à l’heure, limitant le rayon d’action avant ravitaillement à 7500 nautiques.
L’électricité était tributaire de six groupes électrogènes diesel de 480 KVA chacun, débitant, selon les normes O.T.A.N., du 440 V en 60 Hz.
L’armement défensif comprenait huit tourelles automatiques dotées d’un canon de calibre 100 mm Modèle 1953, utilisable en A.A. comme en A.S.F., pouvant tirer 60 obus à la minute.
De février 1987 à mai 1988, les encorbellements portant les tourelles furent modifiés à tribord avant et à bâbord (*) arrière pour installer deux ensembles de missiles Crotale-Edir en remplacement, une unité de lance-leurres SAGAIE étant mise en place sur chaque bord en complément.
Pour une défense efficace, une veille permanente
était assurée par un nombre important de radars spécialisés :
- DRBV 23 B pour la veille IR longue portée
- DECCA 1226 pour la navigation
- DRBV 15 de veille combiné Pulse Doppler à agilité de fréquence (ex DBRV-50)
- DRBI 10 tridimensionnel altimétrique
- DRBC 32 C de conduite de tir pour les tourelles de canons en calibre 100 mm (ex DRBC-31)
- NRBA 51 de contrôle d’approche des avions
- ARBR 16 et ARBR 17 détecteurs de radars en contre-mesure
- SQS-503 en sonar de coque moyenne fréquence
- Balise TACAN SRN-6
L’ensemble des informations ainsi recueillies était transmis, pour exploitation, par le S.E.N.I.T. 2 installé en 1981, comme évoqué plus haut, remplissant les rôles suivants :
- établissement d’une situation tactique grâce aux informations collectées par les différents senseurs du bord
- Diffusion de cette situation tactique à bord ou sur d’autres navires par des liaisons de type 11
- Évaluation de la menace et aide à la prise de décision
- Envoi des informations et instructions nécessaires à la mise en œuvre des armes
Pour les transmissions, outre les liaisons extérieures, par satellite entre autres, avec le système protégé Syracuse, on trouvait de la télédistribution automatisée des messages comme le S.N.T.I. (Système Numérisé de Transmissions Intérieures) et le S.G.A.T.A.P.I.
L’action offensive était l’affaire de l’aviation embarquée comprenant 15 Super-Étendard ou S.E.M. selon la décade considérée, 4 Étendard IV P de reconnaissance photo, 8 Crusader F8 FN d’interception tous temps, 8 avions de sûreté et de lutte A.S.M./A.S.F. Bréguet Alizé et deux hélicoptères pour Pedro, sous la forme de deux Alouette III ou d’une Alouette III et d’un Dauphin dans la dernière décennie.
De plus, et dès 1972, un concept d’alternance P.A.1-P.A.2 fut institué entre le Foch et le Clemenceau, le P.A.1 ayant sa pleine capacité opérationnelle en hommes et en matériel, le P.A.2 étant soit indisponible pour travaux ou maintenance lourde, soit disponible, à effectifs réduits, pour la mise en œuvre d’hélicoptères et de quelques avions avec utilisation d’une seule catapulte. Le P.A.2 pouvait emporter de 30 à 40 hélicoptères, dont une partie fournie heureusement par l’A.L.A.T.
Le pont d’envol blindé mesurait 259 mètres de longueur pour 46 mètres de largeur, la piste oblique, plus spécialement utilisée lors des appontages, faisant un angle de 8° par rapport à l’axe du navire et mesurait 165 mètres de long par 29,5 mètres de large.
Deux catapultes Mitchell-Brown BS 5, d’origine anglaise, de 50 mètres de longueur, fonctionnant uniquement avec des élingues, pouvaient lancer des appareils jusqu’à 15 tonnes à une vitesse de 150 nœuds, le ramassage étant effectué par quatre brins d’arrêt équipés de freins, bloquant un avion de 15 tonnes en 70 mètres.
Le premier se trouve à 46 m de l’arrondi, le dernier étant seulement 22 m plus loin. Deux ascenseurs d’aviation de 16 m par 12 m, un axial de la piste avant et un en encorbellement à tribord, derrière l’îlot, assuraient la manutention des appareils et desservaient un hangar de 132 mètres de long sur 24 de large, 7 mètres de hauteur étant garanti sur toute cette surface.
La régulation des approches était, en plus des O.A. à la charge de deux optiques d’appontage et d’un système d’aide D.A.L.A.S. (Deck Approach landing LAser System) pour l’appontage de nuit ou par mauvaise visibilité.
La dernière intervention aura lieu de septembre 1992 à mars 1993, pour le rendre apte à effectuer les campagnes d'essais du Rafale par adaptation de la catapulte avant à la launch-bar, l’Aéronautique navale rejoignant enfin l’US Navy sur le terrain de la praticité, reléguant partiellement l’élingue de catapultage au rang des jouets dispendieux et lourds d’utilisation.
Le premier appontage du Rafale eut lieu le 19 avril 1993 et, pour faciliter son envol, un tremplin métallique de 10 mètres de long, présentant une pente de 2,5 %, fut soudé en bout de catapulte.
Durant le même temps, les turbines basse pression furent remplacées par des éléments de technologie identique à celle du futur Charles de Gaulle. En 1996, entrant à nouveau en I.P.E.R. (Indisponibilité Programmée pour Entretien et Réparation), cette cure de jouvence autorisera la prolongation de sa vie déjà bien remplie jusqu'en 2005.
Pendant cette interruption, on procéda également au remplacement des quatre dernières tourelles de 100 mm restant par deux systèmes SATCP S.A.D.R.A.L. et une modernisation du S.E.N.I.T.
Il en ressortira mi 1998... juste avant d'être désarmé sur ordre du gouvernement ne regardant jamais à la dépense, lors de l'admission du Charles de Gaulle au service actif.
Le codage O.T.A.N. figurant à l’arrière bâbord du pont d’envol était un F, son code radio Quebec-Alpha.
Par rapport à son sister-ship, Il aura plus de chance, étant non pas ferraillé, mais mis en vente 60 millions de $, même s’il fut abandonné le 15 novembre 2000, au profit du Brésil, pour 20 millions de $ seulement et renommé Sao Paulo.
Sur le plan anecdotique, les Brésiliens ont trouvés (peut-être) et mis en application une modification pour ne plus perdre les élingues de catapultage onéreuses, transformation seulement réalisée jusque là pour celles du Crusader, au vu de leur coût unitaire très supérieur.
*Ecrit par "invité"
Dernière édition par chris le Lun 01 Avr 2024, 19:20, édité 2 fois
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