Bonjour,
Suite au changement d'hébergeur pour mes photos, voici ma contribution d'origine "remasterisée" et étendue avec l'ajout de plusieurs photos.
Voici une visite du
Batavia, une réplique du célèbre navire de la Compagnie des Indes Orientales (VOC) qui coula en juin 1629 près de la côte occidentale de l’Australie.
S’ensuivit une véritable tragédie qui compte dans les annales de l’histoire maritime (tiens, ça tombe bien, je suis justement en train de lire un gros récit sur ces évènements)
La réplique, lors de ses premières sorties en 1995 :
Allez, séquence « petite histoire de l’oncle Bruno » pour les amateurs de frisson z-et d’aventure.
Ami modéliste, je vais essayer de faire court, enfin, pas trop long, sans te raconter… des salades.
Et puis tu auras ta récompense au bout sous la forme d’un concours.
Je suis prêt. L’es-tu ?
Le
Batavia était un « retourschip », un navire de la VOC chargé de convoyer des marchandises et des passagers entre la Hollande et les comptoirs de
Batavia (actuelle Djakarta). C’était à l’époque le plus gros navire de la compagnie, avec une capacité d’emport de 600t.
Il appareilla de l’ile de Texel (Hollande) le 28 octobre 1628 pour son voyage inaugural, avec une grosse cargaison de florins destinés au commerce des épices.
Le navire embarquait 332 personnes : environ 200 marins et soldats, du personnel de la compagnie et des passagers dont une vingtaine de femmes et des enfants qui émigraient vers la colonie.
Il était commandé par le capitaine Ariaen Jacobszoon (abréviation en Jacobsz) mais sous l’autorité d’un surintendant de la VOC, Francisco Pelsaert et son adjoint, Jeronimus Cornelisz.
Le navire intégra un convoi vers la première étape, le Cap (20 semaines de mer, une paille).
Ensuite, au lieu de remonter vers le N-E pour rejoindre directement Java, le convoi emprunta la nouvelle route, droit vers l’Est à travers l’océan Indien via l’île Amsterdam en profitant des vents plus forts sous ces latitudes (les 40
e rugissants) pour gagner plus vite la côte Ouest Australienne, puis remontant vers le Nord pour atteindre
Batavia. Une route plus longue, mais plus rapide.
Un peu comme l’on dit que tous les chemins à Rome mènent.
Seul inconvénient : à l’époque on ne savait pas mesurer précisément la longitude (il faudra attendre le 18
e Siècle et l’invention du mécanisme d’horlogerie à ancre pour disposer d’horloges précises et surtout régulières).
L’arrivée près des côtes Australiennes (désertes et mal connues de surcroit) se faisait carrément au pif, osons le dire.
Cornelisz, jeune apothicaire respecté de Haarlem, avait perdu son premier né et, dans la foulée, abandonné sa jeune épouse malade. Son affaire périclitait et il s’était compromis par ses relations avec des ennemis des calvinistes au pouvoir en Hollande. C’est un homme brillant mais désespéré, fuyant les persécutions et sans doute psychopathe qui était entré au service de la VOC comme sous-intendant pour aller refaire sa vie dans les colonies. Très manipulateur (il ne tuera personne de ses propres mains) mais froid, cruel et calculateur. Il n’avait plus rien à perdre.
Au contraire, Pelsaert était un négociateur, pragmatique et avant tout pour « la paix des ménages », quitte à ne pas prendre de mesure dure quand il le fallait.
Et enfin Pelsaert (d’origine très aisée et cultivé, mais faible et indécis) ne pouvait pas piffrer Jacobsz (d’origine modeste mais compétent, sûr de lui et colérique) qui le lui rendait bien et caricaturait à la craie son supérieur...
Bref, avec un gros tas de florins au milieu, tout ce qu’il faut pour un beau sac d’embrouilles, une belle et bonne ambiance, quoi.
Avant même l’arrivée au Cap, Corneliusz voulait prendre les choses en main et s’associer avec Jacobsz pour s’emparer du navire et de sa cargaison et refaire leur vie ailleurs. Le moyen : créer une tension qui pourrait cliver l’équipage et déclencher une mutinerie.
Mais, malin, ne pas s’y trouver impliqué ouvertement.
Il s’arrangea pour qu’une des passagères de haut rang soit « brutalisée » par un groupe de marins, afin de faire réagir le commandant, entrainer des punitions et casser l’ambiance.
Mais celui-ci ne prit pas de mesure dure et le plan tomba à l’eau.
La tension montait quand, la nuit du 12 juin 1629, le navire s’échoua par vent arrière sur un récif de corail, une petite île de l’archipel désert des Albrolhos d’Houtman à 80km à l’Ouest de la côte australienne, découvertes par Frederik de Houtman 13 ans plus tôt mais non explorées.
Si vous regardez la carte, il n’y a qu’un seul archipel sur des milliers de km et v’lan, il se l’enquille d’entrée ! Bien vu, l’aveugle !
L’archipel central :
1/ Refuge de Hayes et des soldats, 2/ Base d’attaque des mutins, 3/Mouillage du Sardam, le bateau de secours, 4/Cimetière du
Batavia, refuge des survivants sous l’autorité des mutins.
1/ lieu du naufrage, 2/ cimetière du
Batavia, refuge initial, 3/ Iles aux traitres, refuge d’une partie des officiers.
Ici, dans le rectangle, la fouille laissée par l’épave :
Et, manque de bol (à salade), à marée haute… donc impossible de se remettre à flot.
Pelsaert fit débarquer le plus de monde possible sur le banc de sable le plus proche, puis diligenta une reconnaissance des lieux pour trouver de l’eau douce et de quoi manger.
Enfin, les officiers, une vingtaine de passagers (dont un nourrisson) et le commandant embarquèrent sur la chaloupe, prenant la yole en remorque pour tenter de rejoindre la côte australienne (on la savait dans l’Est, mais elle n’avait pas encore été explorée).
Ils laissaient tout le monde sur place, sur des bancs de sable et de corail en plein milieu de nulle part. Corneliusz était resté dans l’épave avec 70 de ses partisans, mais celle-ci finit par se briser et ils durent gagner la terre.
Sur place les naufragés trouvèrent, outre les poissons, des colonies d’oiseaux de mer et des …. relativement mangeables si on le mâche longtemps. Pour l’eau douce, ils recueillaient l’eau de pluie chaque jour dans les toiles récupérées sur l’épave. Sur l’Ile Haute (East Wallabi Island, altitude… 15m), à côté du roc Haith, qui était la plus éloignée
Le drame s’étala de juin à septembre 1629 à travers tout l’archipel archipel. Corneliusz commença par virer le chef désigné du groupe (avec meurtre en prime), puis, pour assurer son pouvoir, fit répartir les naufragés par petits groupes dans les différentes îles du bled, en veillant bien à placer dans la plus éloignée la troupe de soldats et les fidèles au commandant.
Au départ, ceux qui s’opposaient trop ouvertement étaient retrouvés noyés mystérieusement le lendemain. Puis les meurtres à l’arme blanche se firent sans discrétion ni retenue. Les femmes furent mises « au service » des mutins (si vous voyez le doux euphémisme) et beaucoup de naufragés cherchaient à s’enfuir la nuit vers les autres îles… pour se noyer aussi (à l’époque, même les marins ne savaient pas nager).
Pendant ce temps, Pelsaert touchait enfin la côte australienne. Impossible de débarquer en raison des falaises et récifs. Il fallut remonter au Nord jusqu’à l’embouchure de la rivière Murchison où l’on fit provision d’eau (là, pour la première fois un Européen mit le pied en Australie).
Puis les embarcations mirent le cap sur Java et arrivèrent dans le détroit de la Sonde in extrémis (plus d’eau), pour être aperçus et récupérés par un navire de la VOC, le Sardam, qui les débarqua à
Batavia.
Le gouverneur de
Batavia renvoya immédiatement le Sardam en mission de secours, avec Pelsaert comme navigateur, mais la connaissance de la longitude étant … ce qu’elle était, le navire dût zigzaguer à la latitude du naufrage. Il mouilla finalement le 17 septembre devant l’île haute, juste en face de l’île Ouest, la plus importante, occupée par le soldat Wiebbe Hayes et un groupe d’autres soldats et marins, ceux-là qui avaient été « éloignés » par Corneliusz.
Et il était temps : Corneliusz avait décidé d’en finir la veille avec ce dernier bastion et menait assaut sur assaut, repoussés à chaque fois au prix de massacres. Il s’apprêtait à remettre le couvert (à salade) quand il vit le Sardam : il entreprit de s’en emparer, ne voulant pas que les autres révèlent au monde l’étendue de ses crimes.
Il voulut utiliser la ruse (une pseudo-négociation), mais les hommes de Hayes le firent prisonnier. Chez les mutins, il fut remplacé par un marin, Wouter Loos, il faut en convenir : dans ce cas rôle difficile à tenir longtemps. Loos ordonna l’arrêt des meurtres.
Au final les mutins furent capturés ou se rendirent. Une cour fut aussitôt établie sur l’île Hayes. Les coupables et complices furent jugés. Six, dont Corneliusz furent condamnés à avoir les mains coupés, puis être pendus, sentence aussitôt exécutée. D’autres furent condamné à la petite (plouf) ou la grande cale (re-plouf) et Loos et un compagnon furent condamnés à être abandonnés sur la côte australienne.
L’exécution des condamnés :
Le gouverneur de
Batavia, trouvant les sanctions trop légères, en rajouta une couche avec d’autres marins. Pelsaert fut aussi accusé de négligence dans sa navigation.
Sur les 332 personnes au départ, 116 seulement survécurent, dont 5 femmes et un enfant seulement. Les victimes moururent noyées, d’épuisement, du scorbut ou, pour une centaine d’entre eux, assassinés par les mutins après le naufrage.
Le drame du
Batavia fut publié et devint un best-seller en Europe pendant le 17
e Siècle, mais, curieusement la position de l’épave s’était perdue (l’expédition du Sardam avait, au passage, récupéré presque tout l’or de l’épave).
C’est en 1960 que des plongeurs australiens retrouvèrent le point exact : des canons et une partie de la poupe ainsi que des tombes et vestiges sur les îles.
Des archéologues australiens entreprirent de reconstituer la poupe du
Batavia à Freemantle en fixant les restes de bois sur une structure en profilés d’acier.
C’est là que le Néerlandais Willem Vos, constructeur de bateaux traditionnels en bois, entendit parler de cette « reconstitution » et mit au point son projet d’une réplique en respectant les méthodes de l’époque.
Épilogue : le nouveau
Batavia, après son baptême par la reine Beatrix et sa mise à l’eau fit le voyage en Australie… sur le pont d’une barge à l’occasion des JO de Sidney en 2000.
Ami modéliste qui a suivi sans broncher ce long préambule végétarien… tu auras remarqué que j’ai caché dans le texte SEPT types de salade différents : un par province !
Et yo-yohhh, et une bouteille de Rhum !
La réplique… n’en est pas une, dans la mesure où les plans de l’original ont été perdus. Vos s’est appuyé sur les nombreux plans de navires similaires de la VOC, des inventaires et descriptions pour « reconstituer » un projet plausible.
La coque.
Typique de ces navires marchand du début du 17
e : fond presque plat, arrière étroit et montant.
Au milieu du navire, un grand puits carré donnant un accès direct à la cale.
Une vue en coupe du bestiau :
Le même en direct-live :
La poupe, très décorée
Les flancs de la coque :
La proue :
Montons à bord :
À suivre…
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Hi Bob!
C'est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases
Si Vis Pacem Parafilmum
La sous-couche, c'est un apprêt que l'on met avant
Si on bricolait plus souvent on aurait moins la tête aux bêtises
Omnes stulti, et deliberationes non utentes, omnia tentant
Une journée au cours de laquelle on n'a pas ri est une journée perdue
Espérons que le fond de la mer est étanche
Oh, ça c'est le Quacta qui se moque du Stifling
Telle est la Voie !