La Royale Modélisme
Bonjour et bienvenue sur la Royale !

Connectez-vous au forum ou rejoignez la plus grande communauté francophone de modélisme naval !

Bon vent !


La Royale Modélisme
Bonjour et bienvenue sur la Royale !

Connectez-vous au forum ou rejoignez la plus grande communauté francophone de modélisme naval !

Bon vent !

La Royale Modélisme
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Connexion
-17%
Le deal à ne pas rater :
SSD interne Crucial SSD P3 1To NVME à 49,99€
49.99 € 59.99 €
Voir le deal

descriptionHiroshima EmptyHiroshima

more_horiz
Hiroshima (広島市, Hiroshima-shi, littéralement large île) est une ville du Japon située sur la côte nord de la mer intérieure
de Seto, sur l'île de Honshū.
Elle est la capitale de la préfecture de Hiroshima et la ville la plus importante de la région de Chūgoku.


Traversé par six magnifiques rivières, Hiroshima porte le surnom de Ville d'eau.
Les origines de la cité remontent à 1589 lorsque Mori Terumoto, un seigneur féodal, construisit le château d'Hiroshima (aussi connu sous le nom de Rijo ou le château aux Carpes) sur le large delta de la rivière Otagawa.



Hiroshima Tower_10



Comme le delta ressemble à une grande île, la région fut appelée Hiroshima qui signifie précisément « vaste île »
en japonais. La ville devint alors le siège des familles Mori, Fukushima, et Asano, qui posèrent les fondations
de son développement ultérieur et en firent la ville la plus animée du Japon occidental.

Le jardin Shukkei-en, situé au centre d'Hiroshima et classé « beauté scénique » du pays, fut créé comme jardin de villa,
à l'époque d'Edo, par Asano Nagaakira, alors seigneur féodal.

Hiroshima devient un centre urbain d'importance durant l'ère Meiji.
En 1910, sa population est de 143 000 habitants, au recensement de 1940, elle atteint 344 000 habitants.


Hiroshima 11110




Le 6 août 1945 à 2 h 45 (heure locale), le bombardier B-29 piloté par Paul Tibbets, baptisé Enola Gay du nom de sa mère, décolle de la base de Tinian, avec à son bord une bombe atomique à l'uranium 235 d'une puissance de 15 kilotonnes, surnommée Little Boy. L'équipage est composé de douze hommes, dont quatre scientifiques.
Deux autres B-29 l'escortent, emportant les instruments scientifiques destinés à l'analyse de l'explosion.



Hiroshima -b-29_10




À 7 h 09, l'alarme aérienne est déclenchée à Hiroshima ; un avion isolé est repéré. Il s'agit du B-29 d'observation météorologique Straight Flush. Au même moment, deux autres appareils survolent Kokura et Nagasaki pour une mission
de reconnaissance identique.
Les conditions météorologiques sont très bonnes au-dessus de Hiroshima ; la ville est choisie comme cible.
Au sol, l'alerte aérienne est levée à 7 h 30. La ville a été peu bombardée pendant la guerre et les habitants ont l'habitude de voir les bombardiers américains survoler leur ville pour se rendre plus au nord.



Hiroshima Hiro_l10




La bombe, recouverte de signatures et d'injures à l'adresse des Japonais est armée en vol et larguée à 8 h 15, à près de 9 000 mètres au-dessus de la ville. À 8 h 16 min 2 s heure locale, après 43 secondes de chute libre, la bombe explose à 587 mètres du sol, à la verticale de l’hôpital Shima situé au cœur de l'agglomération, à moins de 300 mètres au sud-est
du Pont Aioi, initialement visé car reconnaissable par son plan en « T ».



Hiroshima Before10



L'explosion, équivalent à celle de 15 000 tonnes de TNT, rase instantanément la ville ;
75 000 personnes sont tuées sur le coup, dont un tiers de militaires, la ville étant entre autres le siège de la Deuxième armée générale.
Le "champignon" est monté jusqu'à 10 000 mètres, et fut visible à 500 km.

Dans les semaines qui suivent, plus de 50 000 personnes supplémentaires meurent.
Le nombre total de morts reste imprécis ; il est de l'ordre de 250 000.
Sur les 90 000 bâtiments de la ville, 62 000 sont totalement détruits.
Il ne resta aucune trace des habitants situés à moins de 500 mètres du lieu de l'explosion.




Hiroshima Hirosh11




Hiroshima Hirosh12




Le pont en T et ses environs

Hiroshima Hirosh13




L'énergie née de la fission nucléaire se libère de trois façons:
35 % sous forme d'énergie thermique,
50 % emporté par l'onde de choc et le souffle, et
15 % émis sous forme de radiations nucléaires.

Dès le premier millionième de seconde, l'énergie thermique est emportée, dans un flash de lumière blanche éblouissante, par des rayons X qui transforment l'air en une boule de feu - d'environ un kilomètre de rayon et de plusieurs millions
de degrés - planant quelques secondes sur Hiroshima, et par une onde thermique qui se propage à la vitesse
de la lumière, brûlant tout sur son passage.
Au sol, la température atteint plusieurs milliers de degrés sous le point d'impact; dans un rayon de 1 km,
tout est instantanément vaporisé et réduit en cendres.
Jusqu'à 4 km de l'épicentre, bâtiments et humains prennent feu spontanément ;
les personnes situées dans un rayon de 8 km souffrent de brûlures du 3ème degré.




A suivre....





descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Bonjour merci encore un beau récit. Amitié

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Résistance des constructions

Le « Dôme de Genbaku », le bâtiment le plus proche de l'hypocentre ayant résisté à l'explosion.
Le Dôme était une vitrine pour la promotion de l'industrie dans la préfecture de Hiroshima.
La succursale de la Banque du Japon, à 380 mètres de l'hypocentre, ouvrit à nouveau ses portes deux jours après l'explosion. Le bâtiment est toujours en fonction.


Hiroshima As11




Hiroshima As111




Les bâtiments en béton armé au centre de Hiroshima étaient conçus selon des normes antisismiques.
Leur structure résista en général aux incroyables contraintes provoquées par la proximité de l'explosion.
Du fait de l'explosion aérienne, le souffle avait une direction plus ou moins perpendiculaire par rapport au sol,
ce qui limita peut-être les dégâts. La résistance et la protection qu'offrirent ces structures sont mises en évidence
par les chiffres suivants :
les chances d'être encore vivantes 20 jours plus tard étaient de 50 % pour les personnes qui se trouvaient
au moment de l'explosion à:

200 m de l'hypocentre dans un bâtiment en béton (mais chance de survie finale : 12 %).
675 m dans un bâtiment (non précisé, bâtiments scolaires).
2 km à l'extérieur d'un bâtiment.

Le « Dôme », centre de promotion de l'industrie de Hiroshima dessiné par l'architecte tchèque Jan Letzel,
était très proche de l'hypocentre. Ce bâtiment résista au souffle et fut renommé Mémorial de la paix de Hiroshima.
Il fait partie des monuments de l'Unesco depuis 1996 malgré les protestations des États-Unis et de la Chine.

Les résidences traditionnellement en bois furent complètement rasées par le souffle jusqu'à une distance de 2 km
de l'hypocentre. Au-delà et jusqu'à 3 km les dommages étaient importants mais réparables,
à la condition qu'elles aient survécu aux incendies qui suivirent




Hiroshima Hirosh14

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz

Au sol, la température a atteint les 6000°...
Les tuiles, le verre et le métal ont fondu.



Hiroshima Hirosh15



Hiroshima Hirosh16


Empreintes et ombres de personnes desintegrees par l explosion nucleaire

Hiroshima Desint10


Hiroshima Dead_m10



a suivre....


descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz

Sources

http://www.pcf.city.hiroshima.jp/index_e2.html

"Le peuple japonais et la guerre", éditions Juillard, 1947

"J'ai vu brûler Tokyo", Robert Guillain, éditions Arléa, 1980



descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Merci pour ce récit et je constate que le pont en T a tenu le coup aussi  Wink 

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Démat
Impressionnant!!  affraid  sunny 

_________________
Hiroshima Captur15

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Un triste souvenir de ce que l'humanité est capable de faire, Evil or Very Mad  Evil or Very Mad 

mais beau reportage  Wink

_________________
Les détails font la différence !!!! cyclops  cyclops 

a bientôt,

Olav

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
pascal 94 a écrit:
Merci pour ce récit et je constate que le pont en T a tenu le coup aussi  Wink 


En apparence, car le métal de l'armature à pas mal fondu ...

Petite précision : l'onde de choc avance à la vitesse du son (Wikipedia)

pat_2b

Dernière édition par patdxfr le Dim 03 Aoû 2014, 20:17, édité 1 fois

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Terrifiant !!!

Des termes tels que " Arme de destruction massive" et "Crime contre l'humanité" prennent ici tout leur sens.

Remerciements à Naga pour ce nouveau rappel historique une nouvelle fois très bien documenté.

Amitiés

_________________
Olivier

Hiroshima 500__c10

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Il y avait cet après midi sur la 5 un documentaire de la deuxième guerre mondiale avec des vidéos d'époque en couleur, sur cette vidéo le pont du Missouri n'était pas bleu!!!  Wink 

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Impressionnant d'ailleurs ces reportages en couleur, on a l'impression que c'est beaucoup moins loin dans le temps !

pat_2b

_________________
Hiroshima Bandea11

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Le pont en T :avant

Hiroshima Hirosh17


Apres en 1946

Hiroshima Hirosh18




Epouventable temoignage...

Observateur exceptionnel, le Dr Michihiko Hachiya, directeur de l'Hôpital du Ministère des P.T.T., a décrit ses propres souffrances et celles de ses compatriotes.
Son journal fut déposé aux archives secrètes de l'Université de la Caroline du Nord et sa publication suspendue
jusqu'en août 1955.
D'une valeur scientifique considérable, il constitue aussi, du point de vue humain, un témoignage bouleversant.


Hiroshima 54 jours d'enfer
Le journal, interdit jusqu'en 1955 du Docteur Michihiko Hachiya (extraits)

6 août 1945

Un ciel sans nuage. Des ombres profondes contrastant avec les reflets du soleil sur les feuillages de mon jardin.
Voilà ce que je contemplais, ce jour-là, tôt dans la matinée. Je suis allongé sur la terrasse du living-room, en pantalon
et en maillot de corps ; j'ai veillé toute la nuit à l'hôpital.
Soudain, il y a eu un éclair, puis un autre, et je me souviens - on se souvient toujours des choses idiotes -
que je me demande sur le moment si ce sont des éclairs de lampes à magnésium ou des étincelles provoquées
par un trolleybus.
Ombres et reflets, tout a disparu. Il n'y a plus qu'un nuage de poussière au milieu duquel je n'aperçois qu'une colonne
de bois qui supportait un angle de ma maison. Elle a pris une inclinaison bizarre et le toit de la maison a lui-même l'air
de hoqueter.



Hiroshima Hirosh19




Instinctivement, je me mets à courir. Ou du moins j'essaie. Inutilement. Des poutres jonchent déjà le sol.
J'ai grand-peine à atteindre le jardin. Et là, tout à coup, je me sens extraordinairement faible.
je dois m'arrêter pour reprendre des forces. C'est là que je m'aperçois que je suis complètement nu !
Où sont donc passés mon pantalon et mon maillot ? Qu'est-il arrivé ?
je regarde mon côté droit : il est tout ensanglanté ; j'ai également une blessure à la cuisse.
L'éclat de bois qui l'a produite y est resté fiché. Quelque chose de chaud coule dans ma bouche : ma joue est déchirée. Enfin, en passant la main sur mon cou, j'en ramène un morceau de verre de belle taille que j'examine avec autant
de détachement que si j'étais dans mon laboratoire, penché sur un microscope.
Et soudain, je pense : « Et ma femme . où est-elle passée ? » je crie : « Yaeko-San, Yaeko-San, où es-tu ? »
Mon sang continue à jaillir. Est-ce que par hasard j'aurais la carotide tranchée ? Est-ce que je vais saigner à mort,
comme un porc qu'on égorge ? De plus en plus effrayé, et pour moi et pour elle, j'appelle de nouveau :
« Yaeko-San, où es-tu ? Il est tombé une bombe de cinq tonnes. Réponds-moi, Yaeko-San. Où es-tu ? ».
Pâle et terrifiée, en loques, couverte de sang, je la vois enfin surgir des buissons de notre maison.
Je pousse un soupir de soulagement et l'entraîne par la main.

Rien que pour parcourir le bout de sentier qui joint la maison à la rue, nous trébuchons je ne sais combien de fois. Soudain, alors que nous sommes déjà dans la rue, je marche sur quelque chose de mou.
En me relevant, je m'aperçois que c'est la main d'un homme.
- Excusez-moi ! Oh ! excusez-moi ! je me mets à balbutier, pris d'épouvante.
Il n'y a pas de réponse. La main est celle d'un jeune homme dont une lourde porte cochère, en tombant, a écrasé la tête.
Nous voilà dans la rue, affolés, ne sachant que faire ni où aller; la maison devant laquelle nous nous trouvons s'affaisse tout à coup, dans un bruit de papier.

Puis notre propre maison, que nous venons de quitter, se met à osciller, comme prise de vertige, et s'écrase
dans un nuage de poussière. Toute la rue s'écroule. De par tout des incendies jaillissent, que le vent, aussitôt,
transporte un peu plus loin.
Devant ce spectacle, je n'ai plus qu'une idée en tête : gagner l'hôpital.
Mais j'ai à peine fait trente pas que je dois m'arrêter. Mes jambes refusent de me porter ; je n'ai plus de souffle ;
je meurs de soif.
- Yaeko-San, un peu d'eau !
Mais où aurait-elle trouvé de l'eau ?
Au bout d'un moment, je me remets sur mes pieds. Je suis complètement nu, mais, chose étrange, je n'en suis nullement gêné. Tout sentiment de pudeur m'a abandonné. Un peu plus loin, à un tournant, nous voyons apparaître un soldat
qui, Dieu sait pourquoi. a une serviette enroulée autour du cou. Je lui demande de me la donner pour cacher ma nudité.
Il me la tend sans un mot ; il s'éloigne de même. Quelques mètres plus loin, je la perds et ma femme m'attache son tablier autour des reins.
Notre marche vers l'hôpital se déroule comme un film au ralenti. A la fin, je suis incapable de faire un pas de plus.
Je dis alors à ma femme : « Va, toi. » Elle finit par comprendre qu'il n'y a rien d'autre à faire.
Peut-être trouvera-t-elle quelqu'un qui viendra à mon secours. Elle se penche sur moi un long moment, me regardant
dans les yeux puis, sans un mot, elle se lève et se met à courir en direction de l'hôpital.

Je suis seul. Il fait presque noir. L'éclat fiché dans ma jambe est tombé tout seul et mon sang jaillit comme d'un tonneau sans bonde. Je bouche la blessure avec ma main et il s'arrête de couler. Mais combien de temps aurais-je la force ?
Tout se passe comme dans un mauvais rêve, je vois venir des ombres, des espèces de fantômes qui marchent les bras écartés, je me demande pourquoi. Tout à coup je comprends qu'ils sont brûlés et qu'ils se tiennent les bras écartés
pour éviter le contact de leur propre peau. Puis vient une femme nue tenant un enfant nu dans ses bras.
« Ils ont dû être surpris pendant le bain », me dis-je. Mais il vient ensuite un homme nu, puis une autre femme.
Ils marchent sans dire un mot. Ce silence enveloppant toutes choses donne une impression de cauchemar.
Enfin, au bout de je ne sais combien de temps, quelques forces me reviennent et j'arrive à me traîner jusqu'à l'hôpital.
Tout à coup, je vois des visages amis autour de moi ; je me souviens d'avoir affirmé que je pouvais marcher.
On ne me croit pas. J'entre dans l'hôpital sur une civière, juste au moment où de gros nuages de fumée commencent
à jaillir des toits. Je les vois avec la tête en bas.

- Le feu ! je crie. Il y a le feu et c'est vrai, l'hôpital brûle. En un clin œil, le ciel s'embrase.
On fixe ma civière à un cerisier, dans le parc ; il faut évacuer les blessés, et vite.
Et toujours dans ce silence de cauchemar. Un moment les flammes viennent si près de moi que je me sens cuire.
Je commence pourtant à frissonner. Tout tourbillonne dans ma tête. « C'est fini, c'est l'agonie. »
Un bruit de voix parvient jusqu'à mon oreille. J'ouvre les yeux. Le docteur Sasada est en train de me prendre le pouls.
Une infirmière me fait une piqûre. Je sens mes forces revenir.
A ce moment-là, la charpente métallique d'une fenêtre distendue par l'incendie s'écroule derrière nous
avec un bruit terrible. Une boule de feu roule jusqu'à moi, enflammant mes vêtements; on me jette des seaux d'eau
sur le corps et je m'évanouis de nouveau.
Lorsque je reviens à moi, je suis à l'air libre. On m'a gardé hors de l'hôpital. De la fumée monte encore du deuxième étage, mais l'incendie est arrêté.
- Courage, docteur, me crie une voix. Nous nous en tirerons. Tout le nord de la ville a brûlé.
C'est vrai, tout le quartier nord a été dévoré par l'incendie. Hiroshima n'est plus une ville, mais un désert.
A l'est, à l'ouest, tous les immeubles sont aplatis et les montagnes avoisinantes paraissent maintenant toutes proches. Personne dans les rues, à part des morts. Les uns sont restés dans l'attitude où la mort les a surpris,
ils ont l'air moins morts que gelés. Les autres gisent, recroquevillés, comme tassés au sol par le formidable coup de poing d'un géant.
Un peu plus tard, on me ramène à l'intérieur de l'hôpital et l'on m'étend sur une table d'opération.
Le docteur Katsoube me fait mal lorsqu'il me recoud la joue et les lèvres. J'ai une quarantaine d'autres blessures,
mais lorsqu'on les soigne, je ne sens plus rien. Quand je reviens à moi, le soleil est parti.
Mais l'horizon reste rouge sombre, comme si les flammes de la ville en feu avaient léché tout le ciel.
C'est sur cette vision que je m'endors.


A suivre....

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
7 août 1945

J'ai dû dormir profondément. Comme il n'y a plus ni rideaux ni vitres aux fenêtres, c'est le soleil qui m'éveille.
Il est déjà haut à l'horizon.
Autour de moi, ce ne sont que gémissements. Ma femme est étendue à ma droite, l'onguent blanc dont on lui a enduit
le visage lui donne l'apparence d'un fantôme ; son bras droit est emprisonné dans une gouttière.
Un peu plus loin, sur un banc, j'aperçois la femme du docteur Fujü, son visage reflète l'angoisse et le désespoir.
Elle n'a pas été gravement blessée. Mais son bébé est mort la nuit dernière. En ce moment même, son mari est en train d'errer dans les ruines, à la recherche de leur fille aînée qui a disparu.
Ce qui demeure de l'hôpital est bondé à craquer. Comme c'est le seul bâtiment resté à peu près debout de ce côté
de la ville, tous ceux qui pouvaient encore se traîner sont venus y chercher asile.
Ils sont plus de 150 ; il y en a dans les couloirs ; dans le jardin et jusque dans les lavabos. Quelques-uns sont morts
dans la nuit. Mais ces morts sont moins encombrants que les vivants qui vomissent tous et qui ont tous la diarrhée ; comme ils n'ont pas la force de se lever, ils se laissent aller sur place et il est impossible de nettoyer.
Le docteur Tabuchi, un de mes vieux amis, est entré dans la salle. Il a des brûlures au visage et aux mains,
mais assez légères. Je lui demande s'il sait ce qui s'est passé.
- au moment de l'explosion, me répond-il, j'étais en train de tailler des arbres dans le jardin. Tout d'abord, il y eut un éclair blanc, aveuglant, puis aussitôt une vague de chaleur dont le souffle me jeta par terre.
Par chance, je ne fus pas blessé et ma femme non plus. Mais vous auriez dû voir notre maison. Elle ne s'était pas abattue, mais elle s'était inclinée et, à l'intérieur comme à l'extérieur, tout était démoli.
Un peu plus tard, nous avons vu passer devant nous des centaines de personnes blessées qui essayaient de fuir.
C'était une vision presque insupportable. Toutes avaient le visage et les mains brûlées et les grands lambeaux de peau
qui s'en détachaient leur donnaient l'aspect d'épouvantails. Toute la nuit, ils ont défilé à la manière d'une colonie
de fourmis. Au matin, je les ai retrouvés étendus des deux côtés de la route, à quelques centaines de mètres
de la maison. Ils n'avaient pas pu aller plus loin. Ils étaient tombés là, les uns contre les autres, si étroitement tassés
qu'il était impossible de passer sans marcher dessus.
- Ce matin, en passant au pont de X..., dit alors le docteur Katsutani, j'ai vu une chose incroyable. Il y avait là un homme assis sur une bicyclette. Appuyé au parapet du pont, il avait l'air de regarder au loin. Il était mort. L'explosion l'avait transformé en statue. Qui aurait pu croire que de telles choses pouvaient arriver ?
Il répète cette dernière phrase deux ou trois fois, comme s'il voulait se convaincre que ce qu'il dit est vrai,
puis il continue :
- Il y avait, dans la rivière, des centaines, et peut-être des milliers de cadavres de personnes qui s'étaient jetées à l'eau pour échapper au feu. Mais le plus terrible à regarder, c'étaient les soldats. J'en ai vu je ne sais combien,
complètement brûlés de la tête aux hanches. Ils n'avaient plus de peau et l'on voyait la chair, humide et comme couverte de moisissures. Ils devaient avoir porté leur casquette d'uniforme parce que leurs cheveux n'étaient pas brûlés.
Mais ils n'avaient plus de visage. Yeux, nez et bouche ne formaient plus qu'un seul trou noir et l'on aurait dit que
leurs oreilles avaient fondu. Un de ces soldats sans visage était encore vivant. Il me demanda de l'eau.
Ses dents à nu paraissaient extraordinairement blanches. Je n'avais pas d'eau à lui donner.
Tout ce que j'ai pu faire, ce fut de joindre les mains et de prier pour lui.



Hiroshima Hirosh20




A ce moment, plusieurs personnes qui ont fait cercle autour du docteur Katsutani lui demandent ce qu'il faisait
au moment de l'explosion.
- je venais de prendre mon petit déjeuner, répond-il, et je m'apprêtais à allumer une cigarette quand tout à coup
il y eut un éclair blanc, puis aussitôt après une terrible explosion et je compris qu'il venait de se passer quelque chose d'épouvantable à Hiroshima. Aussitôt je grimpai sur le toit de la maison et, effectivement, j'aperçut du côté d'Hiroshima
un énorme nuage noir. Je descendis alors en toute hâte et je courus jusqu'au poste militaire le plus proche pour raconter ce que j'avais vu et demander qu'on envoie du secours. Et savez-vous ce que l'officier de service m'a répondu ?
Il m'a répondu : « Ne vous tracassez pas. Ce n'est pas une bombe ou deux qui peuvent faire grand mal à Hiroshima ! »
Peu à peu, à travers les récits, je commence à me représenter Hiroshima sous son nouvel aspect.
A l'hôpital même, les choses prennent une nouvelle tournure. Aucun de nos rescapés n'a d'appétit et tous sont maintenant pris de vomissements et de diarrhées. C'est comme si une épidémie de dysenterie avait soudain éclaté.
En plus de l'impossibilité de nettoyer les locaux, l'afflux incessant de gens qui essayent de retrouver les leurs nous met dans un cruel embarras. Des parents, à moitié fous de douleur, viennent nous réclamer leurs enfants. Des maris cherchent leur femme, des enfants cherchent leurs parents. Il y a une pauvre femme qui va sans arrêt d'une pièce à l'autre
en criant le nom de son enfant et personne n'a le cœur de la chasser.
Seize malades sont morts au cours de la nuit. On les a enroulés dans les couvertures blanches et déposés provisoirement près d'une entrée latérale de l'hôpital. L'armée, nous dit-on, se chargera de les évacuer. Elle s'en est chargée en effet, mais à sa manière. Cadavres et couvertures ont été jetés pêle-mêle sur la plate-forme d'un camion et adieu.
Les imbéciles ! ils auraient au moins pu récupérer les couvertures dont les vivants ont bien plus besoin que les morts.

Pour la seconde fois, l'obscurité est tombée et il me semble que moi-même je passe la porte de la nuit.
Peu à peu ma capacité de ressentir l'immensité du désastre s'est émoussée. On s'habitue à tout, même à l'horreur.
A la fin du deuxième jour, nous les survivants d'Hiroshima, nous nous sentons déjà chez nous dans cet empire du chaos
et du désespoir.
Nous n'avons naturellement ni radio ni lampes électriques ni même de chandelles. La seule lumière est celle des incendies d'alentour. Les seuls bruits, des gémissements et des sanglots. Ici un agonisant appelle sa mère dans son délire ;
là, un autre murmure inlassablement eraiyo, ce qui signifie à peu près : c'en est trop ! je ne peux plus le supporter !
Pendant ce temps, seul dans la nuit, je remue mes pensées. Par quelle sorte de bombe Hiroshima a-t-elle été détruite ? Une chose est certaine : il n'y a pas pu y avoir beaucoup d'avions à la fois. Avant le signal d'alerte, j'ai perçu le bruit métallique d'un avion - d'un seul. C'était cinq ou six minutes avant la sirène.




Hiroshima Hirosh10




Au cours de la journée, mes visiteurs m'ont parlé d' « explosif nouveau », « d'arme secrète », de « bombe spéciale »,
mais qu'est-ce que cela signifie ? De toute manière, l'étendue du désastre dépasse de loin toute possibilité d'explication.
Une chose est certaine : Hiroshima est détruite, et avec elle l'armée qui s'y trouvait cantonnée. La guerre est perdue.
Les Américains vont bientôt débarquer, et bientôt sans doute on se battra dans nos rues détruites et
jusque dans notre hôpital.
Soudain, j'entends des pas et je vois une silhouette se détacher dans l'encadrement de la porte.
L'homme marche les coudes écartés. Comme il s'approche, je vois son visage, si l'on peut appeler visage l'amas
de boursouflures qui en occupe la place. Il a perdu son chemin, il est aveugle.
- Vous vous trompez de salle ! je crie, soudain terrifié. Le pauvre diable s'arrête, fait demi-tour et disparaît.
Alors, j'ai honte d'avoir poussé ce cri sous l'emprise de la terreur.
Du coup, ma femme s'éveille et je la vois se lever. Elle quitte la pièce, sans doute pour aller au lavabo.
Lorsqu'elle revient un moment après, je sens qu'il vient de lui arriver quelque chose.
- Qu'y a-t-il, Yaeko-San ?
- En revenant, dit-elle, j'ai marché sur le pied de quelqu'un qui n'a pas protesté et qui n'a pas répondu
quand je me suis excusée. Quelle chose terrible, ajoute-t-elle en frissonnant, c'est sur le pied d'un mort que j'ai marché.



A suivre....

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz

8 août 1945

Journée chaude et claire. Il n'y a plus de fumée au second étage.
Le docteur Katsube est venu me voir de bonne heure.
Sans même lui dire bonjour, je lui ai demandé quand je pourrais me lever.
- vous êtes encore vivant, cela devrait vous suffire pour l'instant, m'a-t-il répondu.
Puis, il ajoute : « vous n'avez pas l'air de vous en douter, mais vous avez perdu beaucoup de sang.
Cette nuit nous avons dû vous veiller sans arrêt. Vous étiez dans le coma. »
L'idée que je pouvais mourir ne m'avait jamais traversé l'esprit. Toutefois, dès cet instant, je comprends que j'avais été plus sérieusement touché que je ne le pensais.

On a récupéré le second étage et l'on m'y a établi l'un des premiers. Il y reste la carcasse métallique de trente lits, mais draps et matelas sont en cendres. D'ici, comme il n'y a plus de rideaux ni même de vitres qui arrêtent le regard, on peut apercevoir Hiroshima en entier, jusqu'à l'île de Ninoshima qui se trouve dans la baie. Et pour la première fois, je comprends ce que mes amis ont voulu dire lorsqu'ils ont parlé de la destruction de la cité. Au centre de la ville, à quinze cents mètres environ, j'aperçois les ruines des deux plus grands buildings. Rien d'autre n'est resté debout ! Hiroshima n'est plus qu'un désert parsemé de tas de briques et de tuiles. Le mot « destruction » me paraît faible ; dévastation conviendrait mieux.
Vers le soir, la brise nous apporte une odeur de chair carbonisée. Ce sont les morts qu'on brûle.
Il est venu un groupe de soldats qui réclamaient des pansements et bien que nous n'en ayons pas assez pour nos blessés et que nous le leur ayons dit, ils se sont emparés de tout ce qu'ils ont nu trouver. Ils se sont conduits comme des brigands plutôt que comme des soldats. Comme si cela ne suffisait pas, il court maintenant une rumeur selon laquelle l'armée veut s'établir ici et préparer un centre de défense. A propos de défense, je me rappelle tout à coup que mon cousin, le capitaine Urane, qui est médecin militaire; est venu me voir le 2 août. J'étais pessimiste quant à l'issue de la guerre il y a six jours, et je lui ai dit. Je lui ai fait remarquer ce jour-là que les denrées devenaient rares et que la discipline se relâchait. Je lui ai confié ma crainte de voir Hiroshima bombardée et la défense antiaérienne complètement inutile.
Mon cousin m'a écouté tranquillement et lorsque j'ai eu fini, il m'a répondu : « Ne vous en faites pas, Niisan,
le chef de l'état-major a dit : peu importe la façon dont la nation critique l'armée, l'armée aura le dernier mot et ce mot sera « victoire »
ce soir avant de m'endormir, je me demande si mon cousin Urabe est toujours aussi sûr de la victoire.




9 août 1945

Ma femme, bien qu'elle ait toujours le bras dans une gouttière, va beaucoup mieux ce matin. C'est elle qui me soigne.
Je me suis amusé lorsqu'elle a demandé de la crème blanche. Elle se l'est appliquée sur les sourcils pour qu'on ne voie pas qu'ils ont été roussis. La coquetterie revient, c'est bon signe.
Mais les diarrhées sanglantes augmentent toujours. Hier, un de nos malades s'est plaint toute la journée de douleurs
dans la bouche. Aujourd'hui, de nombreuses petites hémorragies commencent à apparaître dans sa bouche et
sous sa peau. Quant cet homme est arrivé à l'hôpital, il se plaignait seulement d'une grande faiblesse.
En apparence, il n'avait aucune blessure.
Ce matin, d'autres malades commencent à avoir de ces hémorragies sous-cutanées auxquelles s'ajoutent des vomissements de sang. Pourtant, parmi eux, aucun ne présente de symptômes connus.
Si ces malades avaient été ou brûlés ou blessés, nous pourrions essayer de les soigner. Si bizarres que soient les symptômes présentés, nous rattacherions ceux-ci aux blessures reçues. Mais justement, la plupart de ces malades ne présentent aucune blessure ou brûlure apparente. Dans ce cas, que faire ? Il me semble que la seule cause possible de ces étranges hémorragies est un brusque changement de pression atmosphérique.
Je me souviens d'avoir lu quelque part que ceux qui montent brusquement à de grandes altitudes ou ceux qui plongent trop profondément dans la mer présentent aussi des saignements. En tout cas, à l'Université d'Okoyama,
j'ai assisté à des expériences effectuées dans un caisson pressurisé. Un des troubles dont tous les patients
se plaignaient après un changement de pression brutal était une surdité subite, qui se dissipait par la suite.
Or, l'autre matin, lorsque nous avons été bombardés, je suis sûr de n'avoir rien entendu qui ressemble à une explosion.
Par la suite, pendant que j'essayais de gagner l'hôpital et que les maisons s'écroulaient autour de moi,
je n'ai pas non plus entendu le moindre son, si bizarre que cela paraisse. Tout s'est passé comme dans un film muet.
Et tous ceux que j'ai interrogés depuis ont fait la même constatation.

Au contraire, ceux qui ont vu le bombardement de loin ont entendu un bruit d'explosion. Ils l'ont même appelé pikadon.
Pour expliquer le fait que nous n'ayons rien entendu, il me semble que la seule théorie possible soit un soudain changement de pression atmosphérique qui nous ait rendus temporairement sourds.
De toute façon, nous ne pouvons que faire des hypothèses, car nous n'avons ni radio, ni journaux, ni téléphone,
ni aucun moyen de nous renseigner.
Le docteur Okusa qui était parti à la recherche de sa femme disparue au moment de l'explosion, est rentré tout à l'heure. Il a ramené quelques ossements ramassés à l'endroit où sa femme a été aperçue pour la dernière fois.
Le docteur Yamazaka est toujours à la recherche de sa fille. Le docteur Fujü a retrouvé la sienne, mais elle était morte,
et de nouveau la nuit est tombée, éclairée par la seule lumière des bûchers où l'on brûle les cadavres.
A quelques pas de moi, une petite fille qui occupe le lit d'un officier mort dans la soirée hurle sans arrêt
« Maman, ça fait mal ! Eraiyo ! »


10 août 1945

J'ai essayé de me lever et constaté avec plaisir que je pouvais marcher. Mais aussitôt après, quelqu'un est venu m'annoncer que nous n'avions pour ainsi dire plus de médicaments. Il y a déjà quatre jours que le désastre a eu lieu et nous n'avons encore reçu aucun secours de l'extérieur.
Un groupe de médecins est venu nous voir et nous assurer de sa sympathie. Mais ces imbéciles sont venus les mains vides. Heureusement, un peu plus tard, le docteur Norioka est arrivé d'Osaka à la tête d'un autre groupe, chacun amenant autant de médicaments qu'il avait pu en porter.
Il n'y a eu que deux morts aujourd'hui et pour la première fois la nuit est tombée sans apporter l'odeur de cadavres. Est-ce qu'ils sont tous brûlés ou est-ce que le vent a tourné ? je ne sais. Pour la première fois aussi on m'a apporté une lampe. C'est une simple lampe à huile, faite d'une assiette en fer et d'un morceau de gaze à pansements en guise de mèche. Mais, comme elle me semble briller ! Cette lumière à mes yeux a une valeur de symbole. Elle signifie que la vie commence à reprendre le dessus.


source
nezumi.demousseau.free.fr

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Le 28 août 1945, les Américains débarquent sur l'archipel sous les ordres du général George Marshall. Des groupes d'experts sont envoyés à Hiroshima et Nagasaki. Ils doivent faire un compte rendu de la situation tant au niveau humain que militaire avec la destruction des bâtiments. Les Japonais sont surpris par l'élégance de ces officiers qui se mettent à interviewer des centaines de personnes. Ces témoignages permettront de mieux estimer les effets des bombes sur la population.

Les envoyés spéciaux sont tous abasourdis par l'étendue des dégâts. Le 5 septembre, le journaliste William Burchett publie un compte-rendu dans le Daily Express :

" Les huit premières heures comptèrent parmi les plus hasardeuses de mon expédition. Le train était plein à craquer d'officiers et de soldats fraîchement démobilisés. Des officiers portaient encore leur long sabre [...],
et il me semblait qu'ils avaient une furieuse envie de passer aux actes ".
Après vingt heures de voyage, il saute du train, en pleine nuit, dans ce qui reste de la gare d'Hiroshima.
Immédiatement arrêté par la police japonaise, il ne découvre la cité qu'au petit matin. Il est le premier journaliste occidental à contempler ce champ de ruines, mais surtout à visiter les hôpitaux où des gens meurent d'une façon inconnue :
" A Hiroshima, trente jours après la première bombe atomique qui détruisit la ville et fit trembler le monde, des gens,
qui n'avaient pas été atteints pendant le cataclysme, sont encore aujourd'hui en train de mourir, mystérieusement, horriblement, d'un mal inconnu pour lequel je n'ai pas d'autre nom que celui de peste atomique [...]. Sans raison apparente, leur santé vacille. Ils perdent l'appétit. Leurs cheveux tombent. Des taches bleuâtres apparaissent
sur leur corps. Et puis ils se mettent à saigner, des oreilles, du nez, de la bouche ".

Ce long article que Wilfred Burchett tape assis sur des gravats, en maltraitant sa vieille machine Baby Hermes,
est transmis en morse jusqu'à Tokyo. Publié le 5 septembre à la une du Daily Express et diffusé gratuitement aux autres journaux, il fera le tour du monde. Car personne n'a encore parlé des ravages des radiations.
Pour l'opinion mondiale, les deux bombes lancées par les États-Unis sont simplement des engins de guerre plus puissants que les autres : qu'elles aient contenu de quoi continuer à tuer longtemps après la fin de la guerre est impensable. L'état-major états-unien, qui ne pouvait imaginer qu'un correspondant non accrédité se rende aussi vite sur place, accuse le coup ».


William Burchett

Hiroshima Wilfri10



« Un autre journaliste George Weller, du Chicago Daily News, a également contourné les restrictions officielles de l'époque et atteint Nagasaki, le 6 Septembre.
L'article de 25.000 mots [65 pages] qu'il a écrit sur la base d'entretiens avec des témoins et du personnel médical était beaucoup plus détaillé que celui de Burchett. Mais en tant que membre discipliné du corps de presse, il l’a envoyé au siège de MacArthur pour le dédouanement et le transport. MacArthur a détruit le tout ».
[Cité par W. Burchett dans At the Barricades, London, Quartet Books, 1980, p.1l6].

« L'article de Burchett soulève une tempête. Les responsables états-uniens sont en colère parce qu’il y écrit que le rayonnement résiduel est toujours dangereux et qu’un mois après le bombardement, les gens continuent de mourir de maladies radiologiques, ce qu'il a appelé la peste atomique.
Le jour même de la parution de l’article de Burchett sur les effets des radiations, de sévères restrictions sont appliquées aux journalistes alliés et japonais : alors que les troupes US sont prêtes à entrer dans Tokyo, le Q G du Gal MacArthur interdit la ville aux journalistes alliés. Hiroshima et Nagasaki sont placées en zone interdite ». [New York Times, 5 September 1945, cité in W Burchett Shadows of Hiroshima (1983), p 23].

« De retour d’Hiroshima dans la matinée du 7 septembre, Burchett sort du train à Tokyo pour découvrir que les hauts responsables militaires états-uniens ont convoqué une conférence de presse à l'Hôtel Impérial afin de réfuter son article. Il y arrive juste à temps pour entendre le brigadier-général Thomas Farrell, Directeur adjoint du projet Manhattan, expliquer que la bombe a explosé à une hauteur suffisante afin d'éviter tout risque de rayonnement résiduel.
Quelques jours plus tard, Burchett est admis à faire des analyses médicales dans un hôpital […] ; lorsqu’il en ressort,
son appareil photo contenant des clichés uniques sur Hiroshima et ses victimes a disparu.
Puis, MacArthur lui retire son accréditation de presse et annonce son intention de l'expulser […].
Quelques jours plus tard, les déclarations de Farrell et de son chef, le major-général Leslie Groves, parues
dans le New York Times, décrivent " les allégations de Burchett " comme une propagande japonaise, niant catégoriquement les effets des radiations résiduelles et des contaminations. […]
Quatre jours seulement après l’article de Burchett, à Alamagordo, sur l’emplacement du premier essai atomique appelé Trinity, c'est-à-dire sur le ground zero [l’expression vient de là], Groves, chef du projet Manhattan, en compagnie d’Oppenheimer, invite trente journalistes dont William L. Laurence, " chroniqueur scientifique " au New York Times, qui avait été recruté au Pentagone en mars 1945 comme chef des relations publiques par le même Groves.
Laurence fut témoin de l'essai du 16 juillet précédent et du bombardement de Nagasaki à partir d'un avion
de l'US Air Force. C’est lui qui a écrit la plupart des déclarations officielles états-uniennes au sujet de la bombe,
et qui a publié dans le New York Times une série de dix articles célébrant le triomphe de la science états-unienne
tout en minimisant les dangers des rayonnements.

Le Times a titré sa série du 12 septembre, " Le site de l’essai Trinity dément les mensonges de Tokyo :
l’essai du Nouveau-Mexique confirme que c’est le souffle et non les rayonnements qui ont agi ". Laurence y écrit : " Aucune radioactivité dans les ruines d'Hiroshima ". Et, afin de contrecarrer la version de Burchett :
" Les Japonais prétendent que des gens sont morts du fait des radiations. Si cela est vrai, ils ont été très peu nombreux. Et s'il y a eu des radiations, elles ont été émises pendant l'explosion et pas après.
Les Japonais poursuivent leur propagande pour créer l'impression que nous avons gagné la guerre de manière déloyale ". Laurence recevra le prix Pulitzer en 1946 : il a été parmi les premiers exemples de ce que nous appelons aujourd'hui le journalisme embarqué ».




Hiroshima Hirosh21




Dans ce code, l’occupant états-unien ordonnait au gouvernement japonais d’édicter les consignes nécessaires
pour empêcher la diffusion de nouvelles contraires à la vérité ou qui perturberaient la tranquillité publique.
« Pendant les années qui ont suivi la catastrophe, même dans le principal organe de presse d’Hiroshima,
le Chûgogu Shimbun, il n’existait pas de caractère d’imprimerie correspondant aux termes « bombardement atomique »
et « radioactivité ». Des années de silence ont été imposées après le communiqué officiel diffusé à l’automne 1945
par la commission de l’armée américaine chargée d’enquêter sur les dommages des bombardements d'Hiroshima et Nagasaki :
« Tous ceux qui devaient mourir des suites de la radioactivité dégagée par l’explosion atomique sont déjà morts,
et on ne constate plus d’influence physiologique des radiations résiduelles ».

« La censure préalable de la presse exercée par le Q G visait à la réécriture des articles sans taches d'encre noire
ou sans XXX, c’est à dire sans laisser d’indices de la censure .
L’illusion de la liberté d'expression était essentielle pour atteindre une pleine efficacité.
Aucune donnée scientifique ou médicale japonaise ne pouvait être publiée à propos des bombardements atomiques.
Il a fallu attendre la fin de la période d'occupation en 1951 pour qu’apparaissent dans l’Asahi Shimbun les photographies des victimes du bombardement nucléaire, les Hibakushas, qui montraient les chéloïdes sur leurs corps.
En raison de la censure, toute discussion publique sur les dommages de la bombe, et tous les rapports médicaux [japonais], disparurent, ralentissant considérablement la compréhension du public et la recherche sur les traitements.
Le seul point de vue accepté sur les bombardements, c’était qu’ils avaient abrégé la guerre et devenaient ainsi
des instruments de paix. [… Ce n’est qu’en 1985] qu’il a été montré que les autorités d’occupation avaient saisi ou supprimé non seulement le film japonais sur Hiroshima et Nagasaki, mais aussi des images en couleur, filmées
par une unité militaire de cinéma ». [Greg Mitchell, special report: Hiroshima Film Cover-Up Exposed, Editor and Publisher, August 3, 2005].



source
http://www.fukushima-blog.com

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Merci pour ce récit  Wink 

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
« Les articles japonais ou étrangers qui exaltaient la puissance de la bombe atomique étaient bienvenus,
tout comme ceux qui créditaient la bombe du renouveau idéologique ou de la démilitarisation du pays. […]
Une circulaire avait incité les censeurs à encourager les œuvres qui présentaient la tragédie atomique comme
une expiation des crimes de guerre nippons. Nagasaki no kane [Les cloches de Nagasaki, d’un auteur catholique,
Nagai Tagashi] qui en faisait une grâce divine destinée à racheter les erreurs de la nation, fut donc chaudement accueilli. [Une rhétorique que l’on retrouvera dans la bouche du maire de Tokyo après la catastrophe de Fukushima …]
Le monde doit à la censure d’avoir sous estimé pendant des années les ravages de l’arme atomique …
Assurément, les faits qui ont filtré eurent moins d’impact que s’ils avaient été multipliés par les voix et les regards
de centaines de journalistes … On ne peut qu’aprouver l’historien Seiji Imabori qui affirme qu’en bâillonant les survivants, une occasion unique d’influer sur le destin du monde s’est perdue ».



Les japonais enquêtent très tôt à Hiroshima et à Nagasaki

« En fait, les radiologues et les spécialistes japonais étaient arrivés à Hiroshima quelques jours après le bombardement :
la première confirmation que l'arme d’Hiroshima était une bombe atomique a été fournie par le physicien nucléaire
de premier plan, Yoshio Nishina, le 10 Août. ». [Committee for the Compilation of Materials on Damage Caused by the Atomic Bombs in Hiroshima and Nagasaki, Hiroshima and Nagasaki: the Physical Medical and Social Effects of the Atomic Bombings, Hutchinson, London, 1981, p 504].

On retiendra que dès le 6 août, la base navale de Kure et le Q G de la marine impériale envoient les premiers experts
et qu’entre le six août et le 15 septembre, pas moins de dix-huit équipes japonaises (plus de deux mille personnes) ont commencé à étudier ce qui s’est produit à Hiroshima. Signalons également que le Pr Tsuzuki Masao et son équipe de l’université de Tokyo sont sur place le 30 août et que l'observatoire météorologique du District d'Hiroshima – Isao Kita –
a compilé des documents précieux sur les pluies noires .
Ce n’est que le 8 septembre que des premiers experts militaires états-uniens sont parvenus sur place via la base aérienne d’Iwakuni et que Thomas Farrell, arrivé par celle d’Atsugi, a été guidé par Tsuzuki Masao et le Major Motohashi.
Le 14, le conseil de recherche scientifique du ministère de l'Éducation décide la création d’un comité d'enquête spécial, composé de neuf groupes de travail (physique, chimie, géologie, médecine …), présidé par Haruo Hayashi.
Le seul groupe médical dirigé par Tsuzuki comprenait 33 membres, 150 chercheurs et 1500 assistants.
Cent-trente-quatre rapports ont été rédigés et non publiés.


Visite des experts japonais

Hiroshima Aa14



Les experts militaires états-uniens débarquent avec trois objectifs

Trois équipes militaires concurrentes avaient été créées par la marine (Shields Warren), l’armée de terre (Ashley Scotty Oughterson) et le Manhattan project (Stafford Warren [1]) pour examiner les ruines d’Hiroshima et Nagasaki.
Ces équipes indépendantes tirant à hue et à dia, Mac Arthur décide de les réunir sous la direction d’Oughterson et
la dénomination de joint commission, laquelle, en s’adjoignant des chercheurs japonais,
portera le nom de commission mixte.

Les premiers experts militaires états-uniens étaient arrivés à Hiroshima le 8 septembre, mais la commission mixte
en tant que telle arrive courant octobre seulement. Une de ses tâches fut d’établir un tableau clinique des nombreuses et sévères atteintes liées aux irradiations, la recherche tournée vers d’éventuelles contaminations persistantes par contact, inhalation ou ingestion n’étant pas au programme, puisque le bombardement n’avait officiellement aucunes suites.
Nous savons par divers témoignages que des mesures de radioactivité des sols ont été effectuées par des équipes militaires, mais tout comme la composition exacte des bombes, cela reste à ce jour un « secret défense ».

Fondamentalement, il était de la toute première importance de démontrer que la bombe atomique était, certes
d’une puissance inégalée, mais qu’elle n’induisait ni peste selon les mots de Burchett, ni effet toxique à long terme,
ce que les traités internationaux, la morale et l’opinion publique mondiale auraient pu condamner.
À Los Alamos, cette question avait déjà fait l’objet d’études circonstanciées dès octobre 1942 et les minutes des archives en ligne du « Target Committee » de Los Alamos témoignent encore de cette préoccupation.

Les données rassemblées par les japonais durant les premières semaines furent ardemment recherchées par les militaires états-uniens. En s’appuyant sur l’édit de censure, les films, photographies, poèmes, fictions, témoignages, enquêtes, rapports et autres documents ont été massivement saisis et pour la plupart envoyés à Washington.
Plus déterminant, les occupants ont confisqué ou se sont attribué des contributions, des collections de données,
les systèmes de collectes, les échantillons engendrés par le travail des équipes de recherche japonaises sur place
depuis le 7 août.


Tsuzuki Masao, un chercheur majeur encore largement ignoré

Pour les occupants, les japonais n’étaient pas capables de mener des études sérieuses sur les conséquences radiologiques de la bombe; il n’empêche qu’ils ont su très tôt reconnaître les mérites de quelques scientifiques
« indigènes », dont Tsuzuki Masao, professeur à l'Université impériale de Tokyo, qui a organisé à Hiroshima
la distribution de plus de 145 000 questionnaires à visée épidémiologique.
Tsuzuki est amené à rencontrer Oughterson dès le 21 septembre, puis il est requis pour proposer des collaborateurs japonais en vue de former la commission mixte. Lors d’une réunion de celle-ci [le 12 octobre ?], Oughterson aurait déclaré que « la guerre étant finie, la science étant apolitique et l’aide des japonais indispensable – non seulement à cause
de la barrière de langue, mais parce que le Japon est connu pour ses chercheurs hautement qualifiés
– jamais les fruits de leurs travaux ne leur seraient dérobés ».
Un mois plus tard, au chalumeau, à la barre de fer, au treuil et à la dynamite, les militaires détruisaient le cyclotron japonais et démantelaient le premier laboratoire de recherche de physique et chimie du Japon (Riken), jetant les débris dans la baie de Tokyo.

Les seuls éléments accessibles de la biographie du Pr Tsuzuki sont les suivants.
Il est né dans la préfecture de Hyōgo en 1893 et a fait ses études à la faculté de médecine impériale de Tokyo,
dont il occupera une chaire par la suite. Il a étudié la biologie à l’université de Pennsylvanie en 1925-1926, puis,
à son retour, a débuté l’étude des effets biologiques des radiations sur les lapins.
Le 3 septembre 1945, il initie, pour la première fois au monde, la tenue d'une conférence sur les conséquences
de la bombe atomique. Le 10, il pose à Thomas Farrell, en public, une question gênante :
« Il a été dit que les suites de la bombe atomique resteront puissantes durant 75 ans... qu'en pensez-vous ? ».
Puis le journal Chugoku Shimbun publie, du 11 au 13 septembre une série de trois articles intitulée
« Anatomie de la bombe atomique », incluant des entretiens avec Masao Tsuzuki .
Celui-ci parle très tôt des inhalations de particules radioactives, assimilées à l’époque, à un gaz ou à des toxines.
Par la suite, il écrit des articles dénonçant la malhonnêteté des scientifiques états-uniens et anglais qui ont publié
sous leurs noms et à leur sauce certains travaux de leurs collègues japonais, lesquels auraient réalisé, selon lui,
les plus nombreuses expertises jamais effectuées sur les effets biologiques des radiations.
En octobre 1946, le comité militaire, arguant du fait qu’il fut chirurgien dans l’armée japonaise durant six années
après ses études, décide de le « purger », c'est-à-dire qu’il est officiellement mis à l’écart de tous les comités
de recherche sur les effets de la bombe puis exclu de l’université impériale de Tokyo en 1947.


The Atomic Bomb Casualty Commission
Tsuzuki Masao est le 2eme en partant de la droite

Hiroshima F4_med10



descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz

Au début de 1954, en tant que directeur du nouvel institut des sciences radiologiques, il publiait un rapport indiquant
que les retombées radioactives entraînent des maladies ;
le 1er mars survenait l’irradiation des pêcheurs japonais du Lucky Dragon à la suite de l’explosion de la bombe H
Castle Bravo dans les îles Marshall (15 Mt, mille fois Hiroshima), le plus puissant essai nucléaire états-unien jamais réalisé. Les dégâts imprévus avaient été dissimulés par les autorités états-uniennes jusqu'au 14 mars, date à laquelle le chalutier était rentré au port avec la plupart de son équipage malade.
Son opérateur radio Aikichi Kuboyama allait mourir le 23 Septembre suivant, des suites d'une irradiation aiguë et
malgré les soins du Pr Tsuzuki Masao. D'autres décès allaient suivre. Alors qu’ils se trouvaient en dehors de la zone interdite, les marins avaient ramassé sur le petit navire une poussière grisâtre, qu'ils avaient vite surnommée
« cendre de la mort ». Les Etas-unis accordèrent royalement à la veuve d'Aikichi Kuboyama un chèque d'un million
de yens (2 800 dollars) et en janvier 1955, offraient au gouvernement japonais 2 millions de dollars de compensation
pour les dégâts causés par Castle Bravo.

Tsuzuki Masao a joué un rôle majeur dans cette affaire, prenant en charge les irradiés à Tokyo.
En 1955, il fonde l’hôpital de la bombe A qui fut ouvert l’année suivante à Hiroshima et dont Kenzaburô Ôé parle longuement. Le 17 août 1959 il déclare au Yomuiuri Press n’avoir pas trouvé d’éditeur de langue anglaise pour son livre faisant une recension et une analyse des études médicales menées à Hiroshima.
Il décède en 1961 d’un cancer du poumon.

Cela rappelait de mauvais souvenirs aux japonais : une pétition demandant l’abolition des armes nucléaires fut signée par près de trente millions de japonais …



Comme le Manhattan project, Hiroshima et Nagasaki sont très loin d’avoir livré tous leurs secrets.

« L'histoire de Burchett avec Hiroshima n'a pris fin qu'avec son dernier livre, Les Ombres d'Hiroshima, achevé peu avant
sa mort en 1983. Dans ce livre, non seulement Burchett est retourné à l'histoire de son article initial,
mais il a montré l’ampleur de la dissimulation froidement planifiée et fabriquée qui s'est poursuivie pendant des décennies après 1945. Burchett sentait qu’il était devenu urgent de comprendre ce qui s'était réellement passé dans Hiroshima,
près de quarante ans auparavant :
Basé sur ma propre expérience, il est de mon devoir d’ajouter cette contribution à notre connaissance et
à notre conscience collectives. Avec mes excuses pour l’avoir si longtemps retardé. »
[W. Burchett, Shadows of Hiroshima, Verso, London, 1983, pp.8-9]

L'ampleur de la dissimulation de la vérité concernant les suites des premiers bombardements atomiques est encore
plus grande, plus complexe et plus délictueuse que Burchett ne l’a pensé, ce que confirment les multiples expériences
sur les « Human Products ». Grâce à une censure et à une désinformation de grande ampleur, les perceptions ont été canalisées de manière à obérer la compréhension des phénomènes qui ont atteint la planète et les êtres vivants.

Disons-le clairement : l’histoire complète du Manhattan Project, des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki,
celle du nucléaire en général reste à établir. Même les ouvrages bien renseignés qui semblent faire référence aujourd’hui outre-Atlantique sont peuplés d’impasses cognitives – lorsque le sujet devient délicat – voire de grossières omissions lorsque cela devient gênant (les HP) ou bien encore d’affirmations politiquement correctes et faussement ingénues :
par exemple, les positions des scientifiques états-uniniens peuvent être taxées de « coloniales » et faire l’objet d’un chapitre ad hoc mais y être expédiées en une dizaine de citations et sans que cela n’ait aucune espèce de conséquence théorique ou historiographique, ce que « le point de vue victimaire » du livre sur l’usage des bombes atomiques
vient entériner. Or il s’agit là de l’origine des écarts constatés entre les études menées après Tchernobyl et celles d’Hiroshima-Nagasaki.
C’est sur cette faille historique, philosophique, politique que se sont construits les cinquante-cinq réacteurs du Japon et que s’est mis en place le négationnisme nucléaire, idéologie des appareils d’Etats qui ont couvert ce crime pérenne
contre l’humanité, toujours en cours.

Tiré de « Le nucleaire, érotisation suprême et planétaire de la mort », extraits du chapitre
« Le premier été silencieux de l’histoire du monde ou la mise en scène politique du négationnisme nucléaire ».
Manuscrit déposé à la SGDL.

Jean-Marc Royer


source
http://www.fukushima-blog.com


L'auteur de ce message est actuellement banni du forum - Voir le message

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Merci pour ce récit  Wink 

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Rarement, le sort se sera autant acharné sur un être.
Tsutomu Yamaguchi, décédé le 4 janvier 2010 à Nagasaki à l'âge de 93 ans, était le seul Japonais reconnu a avoir été atomisé à deux reprises : à Hiroshima puis à Nagasaki.




Hiroshima Tsutom10




Ingénieur des chantiers navals Mitsubishi Heavy Industries de Nagasaki, il était en voyage pour son entreprise à Hiroshima
le 6 août 1945 lorsque le B-29 américain largua sa bombe. Il marchait dans la rue, à 3 kilomètres de l'épicentre de la déflagration.

Depuis 3 mois qu’il est dans la ville, il a passé de beaux et juteux contrats et c’est le cœur léger qu’il s’apprête
enfin à rentrer chez lui avec ses deux collègues de travail.

7h45 du matin. Fringant et joyeux, Tsutomu sort de son hôtel et se dirige vers la gare la plus proche.

8h00 du matin. Il réalise qu’il vient d’oublier ses papiers au bureau. Gros coup de stress, il fait demi-tour en courant, se demandant s’il parviendra à monter dans le prochain train malgré ce contre-temps.

8h15 du matin. Le bombardier américain Enola Gay vient de larguer Little Boy, le surnom très sympathique donné à la toute première bombe nucléaire de l’Histoire lâchée sur une population civile.
Le temps semble s’être arrêté l’espace de quelques secondes. Bientôt, le ciel devient blanc, comme un énorme flash d’appareil photo boosté aux stéroïdes. Et puis… plus rien.

9h00 du matin. Tsutomu ouvre les yeux. Depuis combien de temps est-il allongé là, au milieu des gravats? Aucune idée. Un bourdonnement insupportable l’empêche d’entendre quoi que ce soit autour de lui.
Peu à peu, il remet ses idées en place. Le corps meurtri et couvert de blessures, il rampe vers un abri de fortune
pour se mettre en lieu sûr.




Hiroshima Hirosh22




En l’espace de quelques secondes, Hiroshima vient d’être rayé de la carte. Bienvenue dans l’ère de la destruction massive! Mais la mort n’a pas voulu de Tsutomu Yamaguchi. Il devient un hibakusha, nom donné aux survivants des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, et ne fait pas partie des 80.000 victimes que Little Boy a fauchées ce jour-là.

Tsutomi panse rapidement ses plaies, se remet incroyablement vite d’aplomb et rentre dès le lendemain chez lui,
à… Nagasaki. Pour s’y reposer? Non! En bon japonais qui se respecte, il retourne bosser pour son vénérable employeur deux jours à peine après la tragédie.


Nagasaki, le 9 août 1945.

11h00 du matin. Tsutsomi Yamaguchi, les mains encore tremblantes, raconte à son supérieur l’horreur de la scène
qu’il a vécu trois jours plus tôt. C’est le moment que choisit le bombardier américain B29 Bockscar pour larguer Fat Man au-dessus de la ville.
Tsutsomi se trouvait une nouvelle fois à 3 kilomètres du point zéro.




Hiroshima Nagasa10



Comme tous les Japonais victimes reconnues des bombardements atomiques, Tsutomu Yamaguchi avait un livret,
délivré par la municipalité de Nagasaki, attestant qu'il avait été irradié, et qui lui permettait de recevoir des indemnités
et de bénéficier d'un suivi médical.

Depuis mars 2009, sur son livret figurait la mention certifant qu'il avait également été atomisé à Hiroshima.
D'autres atomisés - plus d'une centaine - sont sans doute dans le même cas et ont survécu aux deux explosions,
mais ne se sont jamais fait connaître ou n'ont pas été reconnus comme tels.

Le bombardement à Hiroshima fit 140 000 morts et celui de Nagasaki 70 000, sur le coup et dans les semaines
qui suivirent. Six jours plus tard, le Japon capitulait.
Aujourd'hui, le nombre des morts victimes des bombardements s'élève à 250 000 pour Hiroshima et 140 000 pour Nagasaki. Tsutomu Yamaguchi était l'un des 260 000 survivants souffrant de nos jours encore des suites de leur exposition
aux radiations.

Après la guerre, il travailla comme interprète pour les forces américaines à Nagasaki, puis il enseigna dans une école secondaire.




Hiroshima Tsutom11




En 2005, il avait commencé à raconter le drame qu'il avait vécu, à la suite de la mort d'un cancer de son deuxième fils, victime des radiations lorsqu'il était âgé de 6 mois.
En 2006, il avait participé à un documentaire, Niju Hibaku ("double irradiation"), sur son expérience et lancé un appel
aux Nations unies demandant l'abolition des armes nucléaires.
Il était l'auteur d'un livre retraçant sa tragique expérience ("Nagasaki-Hiroshima : deux fois atomisé").



source
http://www.lemonde.fr

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
Respect....
Hiroshima Smiley11

_________________
Amicalement,
Pierre
Hiroshima Richel10

descriptionHiroshima EmptyRe: Hiroshima

more_horiz
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
power_settings_newSe connecter pour répondre